Arcanes, la lettre
Chaque mois, l'équipe des Archives s'exerce à traiter un sujet à partir de documents d'archives ou de ressources en ligne. Ainsi, des thèmes aussi variés que la mode, la chanson, le cinéma, le feu sont abordés...
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Où que l’on aille dans le royaume, il est souhaitable d’avoir sur soi des papiers, et pas n’importe lesquels. Des certificats de bonne vies et mœurs peuvent faire l’affaire, mais on préfère des passeports. Pour les anciens galériens, on se contentera de regarder leur certificat de congé1.
Ainsi, que l’on vienne de Paimpol ou bien de Mazamet, voire de Blagnac, on doit s’attendre à ce que les capitouls exigent qu’on leur exhibe ces documents, particulièrement s’il l’on est un peu vagabond, ou simplement d’allure suspecte.
Aimé Chapotin est natif de Paris. Après quelques soucis avec la justice toulousaine en 1739, il prend sagement le parti de se faire oublier et de retourner sur les routes de France. Le 17 mars 1741, il en prend un à Caen, avant d’en obtenir un nouveau à Rennes (voir illustration ci-contre) le 7 avril, afin de se rendre en Provence. Il complète sa collection en juillet alors qu’il obtient du vice-légat du pape un dernier passeport à Avignon avant d’en ajouter un nouveau à sa collection. Il n’a visiblement pas le temps de compléter sa collection, et pour cause, l’homme est pressé: le 23 septembre 1741, à peine arrive-t-il à Toulouse qu’il lui prend l’envie saugrenue de marcher droit à la Garonne, d’y patauger jusqu’à s’y enfoncer à mi-corps et puis, tant qu’à y être de s’y noyer, non sans prononcer au préalable une dernière phrase : « Mon Dieu il y a bien de l'eau icy »2. Son corps sans vie est ramené sur la berge le lendemain et, rassurez-vous, les trois passeports serrés dans ses poches n’ont pas pris l’eau. Nous les conservons précieusement3.
Ils ne sont pas les seuls puisque les archives de la justice des capitouls offrent à voir une belle collection de passeports délivrés des quatre coins du royaume, et voire d'Espagne ou encore de Sardaigne (via le consul à Marseille) (lien sur le passeport de Barcelone). Les raisons pour lesquelles ils ont été gardés dans les pièces des procès ne sont pas toujours faciles à déterminer. Pour certains on sait que la route s’est brutalement arrêtée là (pendaison, envoi aux galères, etc.). Pour d’autres, on peut estimer que les capitouls leur auront remis un passeport tout neuf afin qu’ils quittent la ville et pour aller se faire pendre ailleurs.
Il serait logique que les Archives de Toulouse ne conservent aucun passeport délivré par les capitouls, mais nous avons eu le bonheur de découvrir celui d’Antoine Rivière en 1776 ; bonheur qu’il n’a certainement pas été partagé, puisque ledit Rivière se l’est fait subtiliser et qu’il a été retrouvé sur le voleur.
Les comptes de l’imprimeur de la ville font état du nombre de passeports commandés chaque année par les capitouls ; ce sont environ 500 pièces qui sont livrées à l’administration municipale pour être octroyées à ceux qui souhaitent prendre la route en toute légalité (ou tranquillité).
Pour ceux curieux d’en savoir plus sur les passeports, certificat de bonne vie et mœurs ou autres titres de circulation, un atelier Au fil des chroniques des capitouls y sera entièrement consacré le 23 novembre ; mais si vous étiez vraiment pressés, venez-donc à la session du 26 octobre où nous traiterons des épidémies de peste, ce qui nous conduira naturellement à évoquer la question des sauf-conduits.
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1 - Oui, de nos jours, le nom donné à ce document semble un peu ironique.
2 - Phrase qui, si elle avait été médiatisée à temps aurait pu devenir historique, et n’aurait pas manqué de faire pâlir d’envie le maréchal-président Mac-Mahon qui, lui, s’est contenté de passer à la postérité en prononçant face à la Garonne en 1775 : « Que d’eau, que d’eau ».
3 - FF 785, procédure # 165, du 23 septembre 1741.
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Les documents conservés aux Archives sont constitués pour la plupart de matières organiques (papier, parchemin, cuir, cartons, toiles, etc.). Ces matériaux ont la particularité d’être vulnérables aux aléas extérieurs (manipulations, lumière, humidité trop élevée ou trop basse, températures élevées, rongeurs, insectes, moisissures, pollution ou poussière et autres encore).
Afin de les protéger de tous ces facteurs d’altération, les agents des Archives ont un panel de conditionnements spécifiques qui permettent de conserver les documents. Dans cette liste variée, on trouve le passe-partout. Il s’agit d’un encadrement en carton posé sur une œuvre d’art (dessin, pastel, estampe, page enluminée, etc.) ou tout autre œuvre sur papier ou parchemin. Il permet à la fois de protéger le document mais aussi de pouvoir le présenter sous cadre ou sous vitrine lors d’une exposition. Sous cet encadrement en carton, se trouve un autre carton qui, lui, sert de support et sur lequel l’œuvre d’art est fixée. Les cartons utilisés aux Archives répondent à des normes strictes de conservation qui permettent la protection des archives à très long terme.
Quand elles ne sont pas exposées, les œuvres placées en passe-partout sont conditionnées dans des boîtes en carton de conservation.
Nous ne sommes pas les seuls à utiliser le passe-partout, les musées et les bibliothèques patrimoniales l’emploient également pour protéger leurs œuvres sur papier et parchemin.
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