Croix de cimetière médiévale à texte occitan conservée au musée des Augustins de Toulouse. Infographie Marc Comelongue d'après un dessin de Paul Mesplé.

Difficile de retrouver des traces archéologiques de l'occitan…


juillet-août 2015

En effet, les rédacteurs d'épitaphes ont souvent préféré la noblesse et l'autorité du latin pour nous transmettre leur message. Néanmoins il existe au musée des Augustins de Toulouse une série de croix de cimetière, datées du 14e siècle, portant des formules rédigées en langue vulgaire telles Aisi jac / Ci-gît ou Dio laja / Que Dieu l'aie. Depuis leur redécouverte dans les sous-sols du musée en 1903 et leur publication dans le catalogue d'Henri Rachou en 1912, ces objets passent pour être d'origine inconnue. La faute en incombe aux générations successives d'archéologues toulousains qui ont si souvent décrié le premier d'entre eux, Alexandre Dumège, au point de ne prendre même plus le temps de le lire en détail. Il suffit pourtant de consulter son article intitulé « Notes sur quelques inscriptions sépulcrales provenant du cimetière de la paroisse St-Michel, à Toulouse », paru dans les Mémoires de l'Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse de 1854, pour y reconnaître ces croix et localiser leur lieu de trouvaille...

Mais existe-t-il des publications archéologiques en occitan ? A l'issue du Congrès national des Sociétés savantes, tenu à Toulouse en 1971, deux tomes intitulés « Archéologie occitane » furent bien publiés, mais l'on y trouve aucune trace d'un quelconque mot de patois... Il faut remonter le temps jusqu'en 1886 et se déplacer jusqu'aux pré-Pyrénées ariégeoises pour lire sous la plume de Jean Cabibel, curé de Montardit, une « Escursiou scientifico et pittouresco a la grotto d'Enlèno ». L'auteur précise qu'il s'agit d'un « pouèmo tragi-coumiqué» mais décrit bien ce que les chercheurs du 19e siècle ont pu voir dans la caverne d'Enlène, sur la commune de Montesquieu-Avantès, où « lous mes petits coulouers soun remplits cado cop de caousos entassados ». Important habitat magdalénien du Paléolithique supérieur, la grotte recelait « betcop de silex » et de nombreux « coutèts, flèchos, gueillos, rasclets, pigassos et martets, tout è d'os ou dè peïro ». Plus tard, elle abrita une importante nécropole de l'Age du Bronze laissant « forço densès humainos » et quelques objets de parure comme « uno petito dens traoucado per un bout » ou « une lamo de brounzo, à bossos rèpussados, coumo testos de claous roundis et d'un bèch bert ». Il faut noter que la grotte d'Enlène devrait bientôt faire l'objet d'une publication de synthèse sous la direction de Robert Bégouën, à qui l'on doit récemment l'édition de deux importants ouvrages sur les cavernes ornées paléolithiques voisines du Tuc-d'Audoubert et des Trois-Frères.