ARCANES, la lettre

Dans les arcanes de


Chaque mois, l'équipe des Archives s'exerce à traiter un sujet à partir de documents d'archive ou de ressources en ligne. Retrouvez ici une petite compilation des articles de la rubrique "Dans les arcanes", des édito détonnants pour présenter le thème du mois.

DANS LES ARCANES DE


Souvenir de Toulouse, vers 1910. Grands Magasins de Nouveautés "Au Capitole" (éditeur) - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi1010.

De mémoire et d’oubli


octobre 2024

La mécanique synaptique qui anime notre cerveau suit un double mouvement continu de mémorisation et d’effacement. L’un ne va pas sans l’autre. Si l’équilibre se rompt, la machine s’égare sur les chemins maladifs de l’amnésie ou de l’hypermnésie.
Nous, archivistes, petites cellules grises de l’encéphale sociétal, connaissons bien ce processus : trier, classer, détruire, pour mieux conserver la substantifique mémoire collective et la restituer au monde. Le numérique a, un temps, donné l’illusion qu’il était possible de tout conserver, d’autant plus dans un contexte d’injonctions mémorielles. Mais les faits sont têtus, pour pouvoir se souvenir, il faut aussi savoir oublier. Je vous invite donc à un exercice de mémoire tout à fait oubliable, ainsi qu’à un double hommage à Joe Brainard et à son zélateur français Georges Pérec, pour vous présenter le n°157 d’Arcanes.

Je me souviens de ces étranges lunettes de bois, posées sur la toile cirée à motifs de la cuisine de ma grand-mère, qui permettaient de voir des images stéréoscopiques en relief ; 

Je me souviens du terme “pierre morne” apparu au détour d’un texte, que j’avais trouvé autant obscur que poétique, avant de découvrir qu’il s’agissait du lieu d’exposition des cadavres à identifier sous l’Ancien Régime ; 

Je me souviens que l'archiviste qui organisait les ateliers des Samedis des Archives, Mort ou vif, Masterclass et Au fil des chroniques des capitouls, portait des chaussures en cuir noir siglées Christian Pellet, un must

Je me souviens d’avoir réalisé assez tard que le nom du quartier des Ponts-Jumeaux était effectivement lié aux deux ponts côte à côte traversant les canaux de Brienne et du Midi ; 

Je me souviens de la rue Mirepoix et de son restaurant de pâtes où je me rendais fréquemment sans aucune conscience des vestiges archéologiques qui se trouvaient à proximité ; 

Je me souviens d’avoir découvert qu’il existait des bibliothèques dans les services d’Archives, et inversement, sans en être pour autant bouleversé.

Portrait de Claude Nougaro vêtu d’un imperméable Blizzand, années 1960, carte postale publicitaire. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi5867.

Imper et passe


septembre 2024
Le temps passe... Il y a déjà vingt ans nous quittait Claude Nougaro. Petit taureau en imper. Impertinent, l’œil qui frise. Flambeur de film de gangster. Chanteur, fils de chanteur, entré au patrimoine de la Chansong. Passeur de mots.
Les archivistes, eux, sont parfois des passeurs de mémoire. Suscitant, au détour d’une visite de magasin, une révélation quasi mystique chez leurs disciples : Le Paradis, aurait dit le plus toulousains des chanteurs français.
Lui qui s’écriait Nous n’avons pas de passeport sur la bande originale du film L'Ordre et la sécurité du monde (Claude d’Anna, 1978) était aux antipodes d’Aimé Chapotin qui en possédait trois retrouvés sur son corps sans vie en 1741. Le fonds de la justice des capitouls en recèle bien d’autres provenant d’ici et d’ailleurs.
La musique de Nougaro voyageait, pareillement, de la France vers les autres continents, en aller-retour. Des mélodies passe-partout au sens noble, populaires, accessibles au plus grand nombre. Le passe-partout, en matière de conservation préventive, est aussi un moyen de rendre accessible. Mais il s’agit ici de présenter aux yeux du grand public des documents d’archives tout en les protégeant.
Ah, tu verras, tu verras, toi aussi lecteur d’Arcanes, tu verras des lacs, des fermes, des églises de Flourens et Montrabé apparaître sur le site Urban-Hist. Tu verras aussi une mystérieuse inscription surgir, puis disparaître à jamais, sur une façade de la cour Henri IV du Capitole. 
Et surtout, si tu viens aux Archives de Toulouse pour les Journées Européennes du Patrimoine les 21 et 22 septembre prochains, tu verras toutes sortes de choses étonnantes et inédites à commencer par les coulisses des Archives, mais aussi des ateliers, des expositions.  Et si tu n’es pas là, ne te morfonds pas, car dans un an de ça, tout recommencera, tu verras, tu verras...
Astrologue observant une étoile filante au moyen d'une longue vue, carte publicitaire en forme d'éventail de l'imprimerie Hector Labouche, seconde moitié du 19e siècle. Hutinet, D. (imprimeur) - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 14Fi386.

Nul mais prophète en son pays


juillet-août 2024

L’histoire a retenu les noms des prophètes des grandes religions et ceux dont les prédictions se sont réalisées, mais elle a oublié tous les autres. Et pourtant ce sont les plus nombreux : devins à la petite semaine, astrologues du dimanche, prospecteurs au doigt mouillé, ayant souvent en commun une nullité proverbiale. On recherche encore l’olibrius qui avait prédit la fin du monde pour le 21 décembre 2012 dont seul le pic de Bugarach, tel un moderne Ararat, devait réchapper. Plus prosaïquement, je me souviens aussi de cours où l’on nous expliquait doctement que les départements, en tant qu’échelons administratifs, vivaient leurs dernières heures. C’était il y a près de trente ans…

Tout le monde peut avoir son quart d'heure de nullité et les photographes n’échappent pas à la règle. Cela donne des clichés ratés, mais pas dénués d’intérêt. Nous vous en présentons un petit florilège qui va faire un tabac.
Tabac qui était très « prisé » sous l’Ancien Régime en témoignent plusieurs affaires judiciaires de l’époque que l’on pourrait résumer en ces termes : « Fumer c’est nul, mais sniffer c’est pire ».
En revanche, voter c’est très bien, même si parfois les bulletins sont nuls. Mais qu’advient-il de ces derniers après les élections ? Soyez rassurés, ils sont bien conservés.
C’est aussi le cas de la statue d’Héraklès archer réalisée par Antoine Bourdelle, ornant le monument aux sportifs morts durant la guerre 1914-1918. Vous pouvez aller l’admirer dans un écrin de verdure situé au bout du boulevard Lascrosses.
Les archéologues ne sont pas des héros antiques, mais ils se lancent souvent dans des travaux hérculéens et sont fréquemment confrontés à des énigmes dignes du Sphinx. Une opération de fouilles dans le quartier de Saint-Michel-du-Touch suscita ainsi de nombreuses questions.
Vos interrogations et recherches sont quelquefois infructueuses sur notre base en ligne. Ne vous découragez pas ! La vérité est ailleurs, quelque part dans nos fonds non référencés, dans un autre service de la Ville ou un autre service d’archives.

Affiche de la nuit sud américaine au Ramier, le 13 décembre 1956. Émile Godefroy - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 19Fi2289.

La nuit (sud)américaine


juin 2024
Avez-vous déjà remarqué, dans certains films, d’étranges scènes de nuit ? Des scènes où la lune semble briller très fort. Des scènes où vous vous faites l’effet d’un véritable nyctalope. Vous êtes alors probablement en présence d’une nuit américaine. C’est-à-dire d’une séquence filmée de jour qui par le truchement de filtres devient nocturne. J’ai longtemps cru que ce procédé avait quelque chose à voir avec le quart d’heure américain, cette parenthèse enchantée où les filles invitaient les garçons durant les boums. Mais, ils avaient simplement tout deux donné leur nom à des films en 1973 et en 1982. En revanche je n’avais jamais entendu parler de la nuit sud américaine qui s’est tenue le 13 décembre 1956 à la discothèque toulousaine Le Ramier.
Quatre ans plus tôt un autre évènement agitait les soirées toulousaines. Un concours, auquel participait Jean Dieuzaide, organisé par l’Association française des éclairagistes, promettait de récompenser le meilleur cliché d’illuminations nocturne.
Notons qu’en l’absence de ces dernières, l’obscurité est souvent propice aux crimes et exactions. Sous l’Ancien Régime, les soldats du guet veillaient à la tranquillité publique, du couvre-feu à l’aube, et l’on retrouve les procès-verbaux de leurs rondes dans nos fonds, soigneusement conservés.
D’ailleurs il y a des règles assez strictes pour que cette conservation soit la plus efficace possible. L’une d’elle consiste à  protéger autant que possible les documents de la lumière qui peut les endommager.
En parlant de protection, saviez-vous que l’hôtel du Grand Balcon, qui se trouve dans l’angle nord-ouest de la place du Capitole est protégé, au titre des monuments historique depuis 1999 ? Il faut dire qu’y a résidé l’écrivain et pilote, Antoine de Saint-Exupéry, créateur du Petit Prince : héros tombé des étoiles.
Les étoiles, certains en tombent, d’autres les scrutent. C’est le cas des Lanternistes qui constituèrent au 17e siècle la première académie savante toulousaine et frappèrent même médaille pour récompenser leurs membres les plus talentueux. Ils n’étaient pas les seuls et les archéologues métropolitains découvrent parfois des pièces du même type à l’occasion de fouilles.
C’est à un autre genre d’exploration que nous vous invitons pour finir. En effet, notre site internet vous permet d’accéder à des sélections thématiques, un éphéméride, des ressources généalogiques et bien d’autres choses encore. Mais n’y passez pas la nuit !
Reconstitution du double crime d’Ondes, 17 octobre 1972. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi1181.

Au nom de la loi


mai 2024

Un homme marche d’un pas décidé sous la galerie de bois d’une ville de l’Ouest américain de la fin du 19e siècle. Il porte, accrochée à son ceinturon, une Mare’s Leg – carabine Winchester 92 à canon et crosse sciés, ce qui laisse supposer qu’en plus d’être résolu, cet individu est dangereux. Il s’arrête devant un avis de recherche qu’il arrache. A l’écran se sur-imprime en grandes lettres « Au nom de la loi ». Ainsi débutait chaque épisode de la série suivant les pas de Josh Randall, chasseur de primes, interprété par la future star Steve McQueen, qui fut diffusée pour la première fois en France le 25 mai 1963.
Mais tandis que les vedettes d’aujourd’hui affluent sur la croisette cannoise, c’est vers un autre festival, toulousain celui-ci, que nous voudrions attirer votre attention. L’histoire à venir entre cette année dans sa 7e saison et devinez quelle en est la thématique ? "Au nom de la loi". Certes, le Kid de Cincinnati ne fera pas partie des invités, mais les Archives y participeront pour présenter des documents provenant de leurs fonds sur les thématiques "Traquer les criminels toulousains sous l'Ancien Régime" et "Les femmes face à l'épuration légale et extra-légale". Ainsi du 22 au 26 mai vous pourrez assister à de nombreuses rencontres faisant dialoguer diverses disciplines autour de ces règles qui charpentent notre société. Il nous fallait donc, à notre façon, parler loi, en y incluant les volatiles homonymiques, dans ce 153e numéro d’Arcanes.

Si elle était douée de parole Jeanne-Marie aurait pu, quant à elle, participer aux débats du festival en s'écriant, tel un Louis XIV emplumé, "L'oie c'est moi". Car elle appartenait effectivement à la famille des anatidés, mais elle était de surcroît la mascotte chérie du Toulouse Football Club. 
Francon, elle aussi chérissait ses palmipèdes enclos au sein du Collège de Foix mais elle eut maille à partir avec l'un des collégiats. Elle lui tint tête, et de même que nul n'est censé négliger ses oies, nul n'est censé ignorer la loi, cela se termina donc devant le tribunal des capitouls en 1745. Gageons que les protagonistes de cette histoire n'y laissèrent pas trop de plumes.
De plumes, il en sera question, et même plus que cela, pour évoquer nos ateliers d'écriture destinés au public scolaire. Les élèves peuvent y expérimenter la calligraphie à l'aide de ces ustensiles, voire  faire des concours de pleins et déliés.
En parlant de compétition nous poserons ensuite un regard historique sur la pratique du concours d'architecture. De nombreux bâtiments remarquables de Toulouse ont été construits ou restaurés dans ce cadre réglementaire devant permettre au meilleur projet de l'emporter. Ce fut le cas pour l'achèvement du Capitole en 1840 qui vit les deux tiers du bâtiment originel détruits, et contrairement à Rome il n'y eut pas d'oies pour le sauver.
Et pourtant il y avait bien des oiseaux à long cou dans la Tolosa antique si l'on en croit un dessin retrouvé sur une céramique gauloise conservée au Musée du Vieux-Toulouse. S'agissait-il du volatile en question ? 
D'ailleurs si vous aimez les énigmes et devinettes vous apprécierez sûrement notre jeu de l'oie concocté principalement à base d'archives que nous vous proposons en seconde main. Nécessité fait loi...

Exécution du parricide Jean Allières au Port-Garaud, 2 mai 1901. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 25Fi23 (détail).

Hache comme Histoire


avril 2024

En évoquant « L‘histoire avec sa grande hache », Georges Perec a créé, à l’instar de la Mort et de sa faux, une allégorie puissante : la grande Histoire venant trancher, souvent dramatiquement, le cours de la vie des petites gens. Guerres mondiales, civiles, révolutions ont toutes charrié dans leur sillage nombre de destins brisés, à commencer par les propres parents de l’écrivain.

Mais ce sont aussi les petites haches qui parfois font l’histoire, telle celle utilisée par Jean Allières, habitant de Labarthe-sur-Lèze, pour assassiner sa mère dans la nuit du 26 au 27 novembre 1900. Ce n’est pas tant l’horreur du crime ou l’attitude cynique du matricide, mais sa conséquence principale, à savoir le châtiment final, qui devait rester en mémoire. En effet, il donna lieu à la seule photographie connue d’une exécution publique à Toulouse. 

Nous évoluerons donc entre la grande et la petite histoire au fil de ce 152e numéro d’Arcanes en commençant par les mythiques escaliers d’Odessa, magnifiés par Sergueï Eisenstein, mais aussi, on le sait moins, immortalisés par le Toulousain Louis Albinet quelques années plus tôt, lors de la campagne d’Orient. 
Il sera ensuite question de bobards et autres affabulations de témoins qui émaillent les procédures judiciaires pour crime d’adultère dans la France d’avant la Révolution. En revanche, nul mensonge ne viendra entacher notre brève histoire de l’avènement des Archives en France. Seules certaines légendes seront un peu mises à mal. 

Ce ne sera pas le cas de la création mythique des Jeux Floraux à Toulouse, au début du 14e siècle, célébrée dans un tableau de Jean-Paul Laurens ornant l’escalier monumental de l’hôtel de ville.  A cette page d’histoire marquante peuvent s’ajouter toutes les autres pages constituant les Annales de la ville de Toulouse rédigées depuis la fin du 13e siècle jusqu’en 1787. Outre leurs chroniques annuelles, elles recèlent de nombreuses illustrations parfois très utiles aux archéologues.
D’ailleurs, même si nous fermons au public jusqu’au 27 mai prochain pour cause de travaux, tous les amateurs d’histoire et d’archives pourront néanmoins accéder à nos fonds via notre site internet, notre base en ligne et Urban-Hist. Dans l’attente de vous retrouver IRL [In Real Life].

Enfants jouant dans la cour de la maternelle du Béarnais, 17 septembre 1979, photographie N&B, 18×24 cm. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 2Fi3513.

Les p’tits crapauds


mars 2024
Petit, j’aimais bien Kermit la grenouille, mais il a très vite  été détrôné par l’arrivée de Casimir en seconde partie de l’émission 1, rue Sésame. Ainsi, le dinosaure le plus sympa du PAF a raflé la mise et marqué plusieurs générations téléspectateurs français. Certes, ce dernier tenait plus du reptile géant que du batracien, mais ne sont-ils pas tous deux indéfectiblement liés à la jeunesse ?

Car je ne saurais expliquer pourquoi les bambins sont littéralement aimantés par les têtards, grenouilles et autres tritons. Sûrement un mélange de peur et de fascination, comme pour les tyrannosaures. D'ailleurs, à y regarder de près, le scénario de L'Île aux enfants est assez effrayant. Imaginez un groupe d'enfants séparés de leurs parents, isolés sur une île où sévit une bestiole préhistorique. On se croirait plus dans Jurassic Park que dans Oui Oui décroche la lune.

J’invoquerai donc votre âme juvénile pour aborder ce 151e numéro d’Arcanes en vous invitant d’abord à une chasse ranicole qui s’élargira ensuite à toutes sortes de produits de la nature, sous l’œil du jeune reporter Jean Dieuzaide.

Nous remonterons ensuite un peu plus loin dans le passé pour évoquer les perceptions météorologiques sous l’Ancien Régime. Elles varient, certes, dans le temps mais pareillement dans l’espace. Ainsi lorsqu’il y a de l’humidité dans l’air en Normandie, dans le Sud on appelle ça la pluie.

Quoi qu’il en soit, l’eau et les archives n’ont jamais fait bon ménage, car si nos têtes blondes aiment à patauger dans les flaques, c’est un peu moins le cas des archivistes. Pour prévenir ce type de déconvenues des travaux d’étanchéité sont actuellement en cours dans notre bâtiment. Ce qui est finalement assez logique pour un ancien réservoir.

Originellement construit en 1892, cet édifice faisait partie du système général d’alimentation en eau de la ville au même titre que les nombreuses fontaines publiques. Qui s’y intéresse pourra y découvrir, ici et là, des représentations grenouillesques.

De mon côté, je me souviens, enfant, avoir découvert sous quelques centimètres de terre, un gros crapaud vivant. L’expérience s’est avérée assez désagréable, contrairement, j’imagine, aux archéologues ayant fait une batracienne trouvaille sur le site gaulois de Vieille-Toulouse.

Et pour achever cette cure de jouvence, que diriez-vous d’un petit barbotage sur notre base en ligne ? Vous y pécherez sûrement quelques spécimens remarquables !
Supporters agenais dans les rues de Toulouse à l’occasion de la finale du championnat de France de rugby à XV entre Agen et Dax le 22 mai 1966, négatif N&B, 6 x 6 cm. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi7667.

Teuf teuf !


février 2024
« Tiens tout a changé ce matin. Je n’y comprends rien. C’est la fêêête ! La fêêêêêête !» Eh oui, Michel ! Tu as cent pour cent raison, le 150e numéro d’ Arcanes mérite célébration. Et pour tout dire, j’ai bien envie, comme toi, d’enfiler une combinaison en satin rouge à col pelle à tarte, de me laisser pousser les cheveux et la barbe, pour danser et chanter au beau milieu d’un Big Bazar. Car il faut bien le reconnaître, la situation mondiale n’est pas au beau fixe. Honorons donc la newsletter des Archives comme il se doit. Et, même si depuis sa création en 2008, elle commence à avoir quelques kilomètres au compteur, on pourrait la comparer à ces vieux tacots customisés en roadsters dans les années 1950 par des ados en mal de sensations : un peu foutraques, assez amusants et coutumiers de la sortie de route. 
Mais empruntons d’abord l’autoroute de la jaille avec notre fête nationale que le publiciste Marius Bergé s’est plu à photographier durant l’entre-deux-guerres. Entre défilé militaire et compétition halieutique, courses hippiques et joutes sétoises, une mère n’y retrouverait pas ses petits, et pour cause, ils sont au concours de bébés organisé à cette occasion.
Nous vous inviterons ensuite à faire une pause sur l’aire « Corpus corporis » où, dans une ambiance moderne – pour ne pas dire d’Ancien Régime –, notre équipe vous fera découvrir les constats de chirurgiens réalisés à l’occasion d’affaires judiciaires.
Avant de repartir, si vous le souhaitez, vous serez briefés sur les règles à respecter pour conserver vos archives dans les meilleures conditions par notre responsable des fonds privés. Attention, tout contrevenant pourrait voir son don ou dépôt refusé.
La prochaine sortie vous mènera sur le chemin des écoliers, ou plutôt des écoles toulousaines, notamment celles réalisées dans les années 1920-1930 par l’architecte de la ville, Jean Montariol. D’aucuns pensent que le savoir est une fête, lui a fait entrer les salles des fêtes dans les établissements scolaires.
Votre paisible escapade pourra continuer à moins d’être interrompue par un défilé de bergers landais à échasses, ou de catalans dansant la Sardane. Vous serez alors tombé en plein Fénétra, manifestation folklorique locale qui pourrait trouver son origine, si l’on en croit des découvertes archéologiques, dans un culte funéraire.
Et votre grand tour s’achèvera en atteignant le Graal : les archives d’ Arcanes. D’un seul clic vous aurez accès aux thématiques les plus improbables, aux jeux de mots les plus éculés et aux éditos les plus capillotractés. De quoi, nous l’espérons, vous donner envie de continuer le voyage avec nous.
Statue d’Hercule, tombeau d’Henri II de Montmorency à Moulins (Allier), Michel et François Anguier, Thibaut Poissant, Thomas Regnaudin. 1649-1652. Cliché Gabriel Gay - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 51Fi1706.

Travail de dingue


janvier 2024
Herculéen, sisyphéen. Ainsi pourrait-on qualifier le travail des archivistes tant la tâche de collecter aujourd’hui la mémoire de demain paraît immense et parfois illusoire. En effet, est-il vraiment possible d’anticiper les tendances historiographiques des décennies à venir ? Qui aurait pu prévoir, au début du 20e siècle, l’explosion des gender studies que nous voyons actuellement ? Et pourtant, fort de nos connaissances archivistiques, nous essayons au quotidien d’assumer cette mission qui prend souvent un air d’éternel recommencement. D’aucuns pensent qu’il faut être un peu fou pour faire ce métier, je ne sais pas, mais passionné, il faut l’être assurément. Je vous invite donc à découvrir le sommaire du n° 149 d’ Arcanes préparé par des rédacteurs passionnés et passionnants.

Et comment mieux commencer, en matière d’enthousiasme bouillonnant et communicatif, qu’avec Maurice Gourdon. Amateur éclairé, pyrénéiste forcené, photographe éclectique, ses curiosités sont aussi multiples que ses domaines d’activités.
Il en est de même pour les femmes sous l’Ancien Régime sans pour autant que leur soit systématiquement accolé le mot « métier ». Et pourtant au fil des procédures criminelles apparaissent des charrieuses de charbon et autres plieuses et couseuses de livres.
Je ne sais pas s’il y avait beaucoup de plieuses ou couseuses de livre au sein de l’entreprise JOB, mais il y avait sûrement beaucoup de papier. Papier cigarette principalement fabriqué dans les usines de Perpignan, de la Moulasse (Ariège) et de Toulouse que vous retrouverez dans le fonds privé de cette société que nous conservons.
Mais JOB ce ne sont pas que des usines, il y a aussi un hôtel particulier situé boulevard de Strasbourg, faisant office de siège social où l’on trouve même un (faux) château médiéval.
Nous resterons ensuite au Moyen Âge avec les tribulations de deux chapiteaux romans représentant le prophète Job, entre leurs lieux - pas toujours certains - de découverte et leurs institutions de conservation. Si la parole leur était donnée, ils en raconteraient sûrement de belles. 

Pour certains, faire parler des pierres est parfois plus facile que de faire parler des personnes. Néanmoins, les Archives ont lancé des collectes de témoignages  auprès d’érudits, photographes, architectes, syndicalistes toulousains en leur permettant de partager leurs expériences. Plusieurs dizaines d’heures d’écoute et de visionnage sont à votre disposition sur notre site. Un travail herculéen, je vous disais !
Concert du groupe Toto à l’ancien Palais des Sports de Toulouse, mars 1999. Joachim Hocine - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 15Fi12505.

Toto, ma non troppo


décembre 2023
Je ne suis ni un héraut de la météo, ni cynique au point d'ironiser sur la situation dramatique qu'ont connu récemment le Kenya et la Somalie, néanmoins « Je bénis les pluies qui tombent sur l'Afrique ». La traduction de ces quelques mots extraits du tube planétaire de Toto Africa, nous replonge dans les années 1980. Considéré par certains comme un sommet de la pop-rock FM, ce titre débute par un incipit musical devenu presque aussi célèbre que celui de la 5e symphonie de Beethoven. Et pourtant, bien que ce groupe américain se soit produit à plusieurs reprises à Toulouse, comme le prouve ce cliché de 1999, je ne suis jamais allé le voir en concert. L'explication est simple, j'aime bien Toto, mais pas trop. En revanche j'adore le n° 148 d'Arcanes et ses chroniques.
Car les tubes ne se chantent pas seulement, on peut aussi les enfoncer dans le sol pour forer du gaz ou du pétrole. Avec sa maestria et son intrépidité légendaires Jean Dieuzaide réalise des clichés vertigineux dans le cadre de reportages et de commandes pour ses clients de la prospection d'énergies fossiles telle la RAP ou de la SNPA.
La SNPA qui n'est pas la Société nationale protectrice des apprentis qui, si elle avait existé, aurait eu fort à faire avec les maîtres boulangers de l'Ancien Régime tant ils avaient, semble-t-il, la main leste. C'est du moins ce qui apparaît dans les procédures criminelles de l'époque.
On aurait d'ailleurs pu crier au crime lorsque l'acteur-producteur bodybuildé Arnold Schwarzenegger repris en main le projet d'adaptation cinématographique d'une nouvelle de Philip K. Dick qui courrait depuis les années 1960. Grand mal nous en aurait pris car le résultat Total Recall fut un succès populaire et critique qui inspire même les archivistes d'aujourd'hui.
Je me souviens encore de la sortie en salle du film à l'époque où nous étions toute une bande de jeunes a hanter les troquets du « Ouest-Side » toulousain. Parmi eux il y avait la « Bier Akadémie » de Cornebarrieu, bien connue des Allemands d'Airbus. Mais il y a tant d'autres choses à voir dans cette dernière commune, dont le diagnostic patrimonial vient d'être achevé et consultable sur UrbanHist, ne serait-ce que ses châteaux.
Cependant, même si Cornebarrieu a de nombreux atouts elle ne fut pas sélectionnée pour figurer dans la publication « Les 100 villes qui ont fait l'occident » éditée en 1980 sous le patronage de l'entreprise Total. En revanche, c'est le cas de Toulouse et d'un intéressant relevé archéologique conservé dans nos fonds.
Et tandis que l'année s'achève, ainsi que cet édito, vient l'heure du bilan. On ne va pas vous faire la totale, mais sachez que les mois passés ont été bien remplis et que pour ceux à venir nous resterons à votre totale disposition tant sur notre site qu'en salle de lecture.
Cabinet d'Eugène Trutat place du Salin, 1894, négatif N&B sur verre, 13 x18 cm. Eugène Trutat - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 51Fi193.

Visite des tas


novembre 2023

Le premier contact avant la prise en charge d'un fonds est parfois décourageant devant l'ampleur de la tâche. Que celui qui ne s’est jamais retrouvé au milieu de piles d’archives poussiéreuses, dans un ordre tout relatif, me jette la première boîte Cauchard. Je ne connais pas de professionnel du secteur n’ayant une anecdote sur ces « visites des tas » à raconter, mais aujourd'hui je serais plutôt enclin à vous parler des tas de visites auxquelles vous convie le numéro 147 d’Arcanes.
Tout d’abord celles, officielles ou touristiques, qui ont été immortalisées par des photographes toulousains. Du Bey de Tunis au Prince Philip, de la lagune vénitienne au Pallazzo Vechio florentin, vous voyagerez dans le temps et l’espace tel un Doctor Who en archivistique.
Vous suivrez aussi les pérégrinations du syndic des visites, sorte d’inspecteur de l’hygiène au sein des abattoirs de la ville au 17e siècle qui, à l’occasion d’une épizootie, est chargé de publier un arrêt du parlement dans les villes de Gascogne et Languedoc.
Plus près de vous, sans être pour autant plus accessibles, les magasins d’archives habituellement interdits au public pour des raisons de conservation et de sécurité, s’ouvrent tout de même une fois par an pour des visites lors des Journées européennes du patrimoine.  
Mais peut-être préférez consacrer vos week-ends à d’autres activités. Pourquoi ne pas aller voir un parent âgé, et pour ce faire, emprunter un parcours jalonné d’édifices remarquables dans le quartier de la Côte-Pavée ? Toutefois, si vous portez votre manteau rouge, méfiez-vous de n’être suivi par une personne peu recommandable.
L’évêque, lui, devait être tout de violet vêtu lors de ses visites pastorales, dont les notes sur l’état des églises constituent une source non négligeable de l’histoire de ces édifices sur lesquels travaillent les archéologues. Plus prosaïquement, ces derniers sont généralement affublés de vestes de sécurité fluorescentes, notamment lors des journées portes ouvertes où ils vous accueillent sur des sites fouillés ; ce qui peut créer une confusion en cas de visite de gilets jaunes.
Si vous préférez rester chez vous, en pilou-pilou, les Archives peuvent néanmoins venir à vous. Des reportages sont à votre disposition sur notre site pour admirer notre superbe bâtiment et rencontrer notre sympathique équipe. Mais que cela ne vous empêche pas de venir nous voir en vrai (on est mieux).

Arrêt de jeu lors de la finale du championnat de France de rugby à XV entre le Football club Lourdes et le Rugby club toulonnais au Stadium (Toulouse), le 16 juin 1968. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi7317.

L'intro de l’intrus


octobre 2023
Dans cet extrait du célèbre discours d’André Malraux prononcé devant le Panthéon s’est glissé un intrus ; à vous de le découvrir : « En tricycle, Jean Moulin, avec ton terrible cortège ». Il est tout à fait incorrect de dénaturer un texte historique, mais, pour tout un tas de raisons, l’image d’un terrible cortège en vélos à roulettes me réjouit. La chose, si elle existait, mériterait qu’un photographe du talent d’André Cros la fixe sur gélatine. Car son œil aiguisé avait le don de débusquer les détails qui détonnent, les personnages étonnants, les situations cocasses. Imaginez : alors que se joue la finale du championnat de France de rugby à XV de 1968 au Stadium de Toulouse entre Lourdes et Toulon, il aperçoit, au second plan, un spectateur juché sur le toit du bâtiment, un parapluie à la main, qu’il s’empresse d’immortaliser : une photographie parmi tant d’autres que vous pourrez découvrir dans l’exposition « André Cros, photographe de terrains. Clichés de rugby 1945-1988 » et dans l’ouvrage éponyme tout juste paru aux éditions Privat.

Mais André Cros n’était pas le seul à traquer le singulier. Certains cherchent les traces, volontaires ou pas, laissées par les photographes dans leurs images : de l’autoportrait à l’ombre portée. D’autres, mus par une ambition dévorante, se sont créés des généalogies imaginaires en falsifiant des documents on ne peut plus prestigieux : les Annales manuscrites des capitouls. Les archivistes ne sont pas en reste et proposent de nombreuses activités insolites à des horaires qui ne le sont pas moins : en soirée, la semaine, et en matinée, le samedi. Mais si cela ne vous intéresse pas, vous pouvez toujours aller flâner du côté de la rue du Collège de Foix où subsiste le clocher du disparu couvent des Cordeliers. Son aspect solitaire l’a fait surnommer « Tour » par les Toulousains. C’est à un autre tour que nous serons invités ensuite, dans les entrailles de la terre, à la poursuite d’artefacts farceurs qui voyagent dans le temps et viennent parasiter les fouilles, laissant nos amis archéologues perplexes. Non moins perplexes sont les archivistes lorsqu’ils se trouvent confrontés à des pièces isolées qui, bien qu’appartenant à un fonds, ne peuvent être rattachées à aucune catégorie de ce dernier. Il faut alors déployer des trésors d’ingéniosité pour trouver une solution, et si rien ne vient, accepter simplement l’intrus dans sa richesse et sa singularité. Amen.
Pompéi, vue animée sur le forum, avril 1888. Cliché Georges Ancely. Cliché positif sur plaque de verre, 8,5 x 10 cm, ancienne collection Eugène Trutat. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 58Fi108.

Le Grand Tour


septembre 2023

À l'instar de générations de jeunes gens fortunés d'Outre-Manche (mais pas que) qui, sous l'Ancien Régime et même jusqu'à la Belle Époque entreprenaient leur Grand Tour en traversant l'Europe pour généralement atteindre l'Italie, voire la Grèce, nous vous proposons une alternative à moindre coût et bien plus écologique : un Grand Tour de ce numéro de rentrée d'Arcanes et par là-même le Grand Tour des Archives de Toulouse, ceci depuis votre fauteuil ou votre canapé.
Pensez, en quelques lignes vous allez pouvoir arpenter entre 17 et 20 kilomètres d'archives. Quelle aubaine !

Le Grand Tour peut ainsi débuter avec Jean Dieuzaide, qualifié ici de métatouriste. Il sillonne la France et photographie les monuments extraordinaires ou emblématiques qui vont servir à illustrer guides touristiques et ouvrages spécialisés, particulièrement dans l'art roman. Une invitation au voyage que l'on retrouve au travers de 60 albums conservés aux Archives.
Besoin de fraîcheur ? Qu'à cela ne tienne, l'aventure continue au fil du canal du Midi avec les archives d'Urbain et d'Henry Maguès qui nous ouvrent des voies d'eau mais ne répugnent pas à œuvrer sur terre et à préfigurer la grande percée d'Alsace-Lorraine.
L'étape suivante pourrait correspondre à un Grand Tour rabelaisien : on semble faire un crochet en Sorbonne, mais les pensées de Jacques Levron évoquent finalement les réserves auxquelles l'archiviste-paléographe doit se tenir dans son implication avec les syndicats d'initiative. Subtil rappel aux locaux des Archives de Toulouse qui, jusqu'en 1946, étaient dans le donjon, à l'étage de l'actuel Office du tourisme.
Notre Grand Tour ne nous amène peut-être pas jusqu'aux ruines de Pompéi et d'Herculanum, mais il nous invite à naviguer entre plusieurs bâtiments fièrement dressés vers l'azur toulousain, de la Poste ancienne de Léon Jaussely à la Téléphonie nouvelle d'Andrée Moinault, en passant par le Monument aux combattants (qui d'ailleurs, lui aussi, a fait son « Petit Tour », très remarqué, durant l'été).
Nous quittons un instant les galeries souterraines du réservoir de Périole afin de pousser notre pérégrination vers les monts Pyrènes, jusqu'à la grotte du Mas d'Azil, l'affiche est alléchante, et son auteur nous renvoie immédiatement vers les Archives puisqu'une partie de ses classeurs de dessins y est conservée, en attendant paisiblement une restauration préalable, puis un classement définitif.
Ce numéro d'Arcanes ne s'achèvera pas par un retour à la case départ car nous vous proposerons au contraire une manière de prolonger votre Grand Tour à votre guise, avec une sélection de destinations à faire pâlir d'envie les plus grandes agences de voyage. Les pantouflards y trouveront leur bonheur, comme les amateurs d'eau iodée ou de torrents d'altitude. Il y en aura même pour les fondus de romantisme, Grand Tour oblige.

Nous pourrions ainsi adapter cette platitude toute faite « les voyages forment la jeunesse » en une réflexion bien plus profonde : « les voyages dans les Archives ouvrent des fenêtres sur les mondes tant proches que lointains, passés ou à venir ».

Combles de l’ancien collège de Mirepoix, vers 1890. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 51Fi1692.

Sales combles


juillet-août 2023
Les clichés ont la vie dure et l’imaginaire collectif associe encore souvent les Archives à des caves humides ou des greniers poussiéreux. Il y a certes un peu de vrai là-dedans car nous collectons parfois des documents dans des lieux incongrus mais, une fois arrivés dans nos locaux, ils bénéficient de conditions de conservation idéales. Nous les faisons parfois sortir pour le bonheur du public. C’est ainsi que près de 42 000 visiteurs ont pu voir les photographies de Jean Dieuzaide, issues de nos fonds, lors de l’exposition organisée en 2021-2022 avec la galerie du Château d’Eau et le couvent des Jacobins. Les spectateurs ont pu voyager, au fil des images du célèbre photographe, des campagnes de France aux villes du Portugal, en passant par les églises espagnoles et les ports ottomans.
C’est à un autre voyage que nous sommes tout d’abord invités à la lecture de ce numéro d’ Arcanes, partant des quais de la Garonne et de ses lavandières vers les côtes africaines via l’Aéropostale. Du linge à la ligne, il n’y a qu’une lettre qui chemine.
De cheminée et de fumage, il aurait pu en être question ensuite, mais nous aborderons plutôt la salaison, autre procédé de conservation des viandes sous l’Ancien Régime, qui manifestement attise les convoitises. Mon royaume pour un jambon !
Pas de nourriture en salle de lecture des Archives. Pas de public non plus. Du moins pour l’instant, car elle ne rouvrira qu’en août après plusieurs semaines de travaux de mise aux normes.
En parlant de normes, il faut croire que la sculpture de la « Victoire » ornant le Monument à la Gloire des Combattants de la Haute-Garonne était singulièrement hors du canon esthétique de l’époque tant elle fut qualifiée de « navet agressif » par ses détracteurs. Je propose d’ajouter aussi « salsifis rageur » et « topinambour violent » à la gamme des peu clairvoyants critiques de salon des années 1920.
Quittons donc ces pièces feutrées, pour remonter le temps vers la médiévale Salle-Neuve du Château Narbonnais de Toulouse, siège du pouvoir comtal et, plus loin encore, dans les tréfonds du mythique Salon noir de Niaux. Notez qu’à la différence de sa cousine de Lascaux, cette dernière grotte pariétale n’a pas été répliquée.
Ce n’est pas le cas de notre salle de lecture qui a été en partie virtualisée, permettant ainsi d’effectuer une partie de ses recherches en ligne. A bon entendeur, salé !
Jeunes à moto, 3 juillet 1974. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi5262.

Mes gâtés…


juin 2023

Nul besoin d’être attifé comme un rappeur marseillais pour vous témoigner de l’affection. Je ne porte ni barbe, ni queue de cheval, ni boucles d’oreilles, je fais encore moins des roues arrière avec ma moto et ma belle sur le Vieux-Port, et pourtant, j’aime à vous appeler mes gâtés. Car vous, les Arcaniens et Arcaniennes, êtes vraiment vernis. Il n’est qu’à lire le nouveau numéro d’Arcanes pour s’en convaincre.

Tout commence par un accident. Le « big bang » d’un tramway qui, par un fatal enchaînement, finit dans le canal du Midi. Il s’est pris pour une péniche ou quoi ? Vous pouvez rire mais, quelques années plus tard, des esprits éclairés songèrent à transformer ledit canal, non pas en voie ferrée, mais en autoroute.

C’est un autre chemin que va emprunter Louis-Paul-Raymond-Toulouse, celui du crime. Ce blouson doré de la première moitié du 18e siècle va ainsi décevoir tous les espoirs qui avaient été placés en lui. Fréquentant des clubs de jeux clandestins, il n’hésite pas tricher au point d’être qualifié d’espion par ses partenaires.

D’espionnage, il n’en sera bizarrement pas question avec le CIA, car il s’agit ici du Conseil International des Archives, et non des services secrets américains. C’est décevant mais, si vous étiez bibliothécaire, votre instance internationale s’appellerait l’IFLA - et ça ne fait même pas rêver.

Que cela ne vous empêche pas de vous rendre, bras-dessus bras-dessous avec vos collègues de la lecture publique, aux festivités de la rue de Metz, les 24 et 25 juin prochains. Vous pourrez y trouver des informations sur l’histoire et le devenir de cette voie actuellement en travaux.

Une autre sorte de chantier est le visage de Socrate, si l’on en croit les représentations parvenues jusqu’à nous, telle une sculpture du musée Saint-Raymond. A tel point que des mauvaises langues affirmaient que son goût pour les jeunes éphèbes l’avait fait qualifier par ces derniers de « papa-gâteau pas pas gâté ». Mais je n’en crois rien.

En revanche, j’ai toute confiance dans la politique de numérisation des Archives qui permet de préserver les collections et de rendre les fonds accessibles au plus grand nombre. Ainsi, chaque année, les documents généralement les plus demandés sont digitalisés et mis en ligne sur notre site. C’est le cas des registres d’état civil de l’année 1921 que vous pouvez désormais consulter de chez vous. Gâtés que vous êtes !

Affiche du concours régional agricole de Toulouse, 1964, offset, 60 x 40 cm. Roger Seguin - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 12Fi2814

De fruit et de saveur


mai 2023

Avec le temps des cerises vient aussi le nouveau numéro d’Arcanes, embrassant une thématique éminemment saisonnière. À l’instar des pies et autres merles, nous pourrons donc picorer ici et là dans des articles tous plus alléchants les uns que les autres.
Il est amusant de constater qu’en France nous avons le téléphone arabe alors que les États-Unis ont un « grapevine telegraph », nettement plus fruité. Sachant cela, le tube « I heard it through the grapevine » devient nettement plus compréhensible. Marvin Gaye entend dire des choses, mais ce ne sont pas les grappes de raisins qui lui parlent. Elles ont néanmoins beaucoup parlé à Jean Dieuzaide qui les a photographiées, notamment leur cueillette, et plus largement, s’est intéressé aux gestes ancestraux du monde rural.
On peut d’ailleurs se demander comment nos ancêtres faisaient pour survivre aux banquets gargantuesques, tel celui donné par les Capitouls le 28 mai 1770. Il paraît qu’en ces temps, on prouvait sa puissance en présentant les produits les plus frais. En revanche, il était très mal vu de les manger, et les plats repartaient à peine entamés. Il existait ainsi un fort commerce de revente des reliefs de ces agapes.
Toutefois, que cela ne vous empêche pas de goûter à notre salade d’archives, à base de Derrida, Margel et Chabin. Elle est riche de concepts éclairants et d’idées séminales, mais pas toujours très digeste. Un peu de sport ne vous fera aucun mal.
Pourquoi ne pas alors arpenter la rue de la Pomme, qui tient son nom fruitier de la salle de jeu de paume qui s’y trouvait. Outre cet ancien terrain de tennis sans raquettes, elle recèle bien d’autres mystères, dont des décors énigmatiques et des fenêtres disparues.
C’est aussi pour faire revivre des vies disparues et oubliées que nous améliorons sans cesse notre base, pour rendre accessible le plus grand nombre de documents de nos fonds dans les meilleures conditions. Vous rêviez de connaître les histoires qui affolaient la noblesse française au 18e siècle ? Vous pouvez désormais y accéder chronologiquement à travers la correspondance de la marquise de Livry et de la présidente Dubourg : une nouvelle interface, fruit d’un travail collectif.

 

45 tours de André Montals, où figure « O Toulouse », composé par André Saint-Paul et Carolus, Disques Welson, 1959. Papo Paris - Mairie de Toulouse, Archives municipales, Z nc.

J’aime la galette…


avril 2023
Il paraît que les meilleures galettes sont celles avec du beurre dedans. C’est probable, mais pour moi, ce sont celles dans lesquelles il y a surtout du vinyle. Car je suis, depuis mes 16 ans, un chasseur de 33 tours, un chineur d’acétates, un « digger » de 45. Bref, je collectionne les vinyles. Vous pouvez imaginer ma joie en découvrant le thème du 141 e Arcanes.

Il nous emmène d’abord dans le Toulouse des années 1920 à 1960 où s’épanouit une florissante scène jazz, heureusement immortalisée par plusieurs photographes, dont Jean Dieuzaide. Notez, au passage, que le premier disque de rock français fut enregistré en 1956 par un artiste toulousain issu de ladite scène, Jean-Baptiste Reilles, alias Mac Kac.

Son surnom lui a, paraît-il, été donné à l’école de Saint-Cyprien où il était chahuteur en chef. Et de vacarme et tintamarre, il en sera question dans les procédures d'Ancien Régime où, lors d’une cérémonie, des chants religieux prennent progressivement des accents profanes, voire grivois.

Des accents du terroir, on peut en entendre sur les vinyles que nous conservons dans nos fonds. Je pense particulièrement à ce 45 tours où le maire de Toulouse de 1965, Louis Bazerque, chante La Toulousaine de Deffès et Mengaud : « Ô Moun Païs, Ô Toulouso ».

Même si ces paroles, chipées par Nougaro, nous font chaud au cœur, il ne faut pas être chauvin ni oublier les autres communes environnantes qui composent l’actuelle métropole. Au premier rang desquelles, Lespinasse et Saint-Orens, qui viennent de faire leur entrée dans Urbanhist. Vous y trouverez des notices sur de nombreux édifices. Rien encore sur des sites préhistoriques. Mais qui sait ?

Probablement l’abbé Henri Breuil, qui en connaissait un rayon en matière de préhistoire. Et miracle ! Il existe un enregistrement sur acétate où l’éminent savant partage sa science. Honoré par ses pairs, il a même reçu de nombreuses distinctions au cours de sa carrière, dont la Society of Antiquaries of London’s Gold Medal.

Et de gold medal à Goldfinger, il n’y a qu’un pas, que nous nous proposons de franchir dans un exercice d’archéologie musicale que n’aurait pas renié le bon abbé. Sous des milliers de strates de vinyles accumulés depuis les années 1980, il y a un filon toulousain qui brille…
Salle Edouard-Filhol du Muséum d’histoire naturelle de Toulouse, vers 1920. Augustin Pujol - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi7059.

Que d’os, que d’os !


mars 2023
Tel un explorateur découvrant le mythique cimetière des éléphants, je ne peux que paraphraser Patrice de Mac Mahon pour exprimer, non pas ma stupeur, mais mon émerveillement à la lecture des chroniques de ce 140 e numéro d’Arcanes.
D’émerveillement et d’exclamation, il en est question pour les archivistes qui travaillent quotidiennement à la description des images de nos fonds iconographiques. Qu’elles représentent des monuments disparus, un point de vue intéressant ou même un individu singulier, pour ne pas dire un drôle d’oiseau, elles nous mettent régulièrement des étoiles dans les yeux.
A propos de volatiles, nous causerons ensuite oiseleurs, canaris, chardonnerets et autres serins sous l’Ancien Régime. Les amateurs de beaux plumages et de chant mélodieux seront ravis. Pour ma part j’ai un faible pour le « coin coin » du canard et son œil si parfaitement placé qui en fait – pour citer un grand cinéaste – « l’un des plus beaux animaux ».
On sait que les congénères de Donald Duck apprécient proverbialement l’eau, mais ce n’est pas du tout le cas des archives. Et si elles sont sévèrement endommagées lors d’une inondation, il n’y a souvent d’autre solution que la congélation. Mais pour pouvoir retrouver leur état initial, elles doivent subir une phase de déshydratation qui peut s’avérer parfois périlleuse pour leur état.
Il faut croire que certains nos ancêtres craignaient aussi d’être déshydratés tant ils firent bâtir des puits dans leur lieu d’habitation. Près de 78 ont été inventoriés dans des demeures toulousaines, un article récent en étudie la répartition, les modalités de puisage et de construction.
D’ailleurs, on pourra signaler que, dans le secteur du bâtiment, les anciens étaient éco-responsables avant l’heure en pratiquant la réutilisation de matériaux. C’est ainsi que l’on a retrouvé dans les murs de l’église du village pyrénéen d’Oô – bien connu des cruciverbistes – une pierre sculptée représentant une scène fort peu catholique.
Sur le territoire de cette commune se trouve le lac glaciaire éponyme. De par son altitude - 1500 m - et la température de son eau, inférieure à 15°, il est peu propice à la baignade, à la différence des équipements nautiques de la ville de Toulouse. Ces derniers permettent de pratiquer toutes sortes d’activités allant du water-polo à la natation synchronisée. D’ailleurs il faut que j’arrête cette chronique parce que demain matin j’ai piscine.
Extrait d'inventaire judicaire de la succession du sieur Belloc, cahier faisant partie d'un registre factice d'inventaires de meubles, de papiers et autres dressés devant le commissaire au fait des inventaires, 1688. Marie de Toulouse, Archives municipales, FF 409, non folioté.

Vertiges


février 2023
Le thème de ce mois de février gravite autour du VER-VERT-VERRE sous toutes ses formes. On eut aimé vous présenter un numéro d'Arcanes entièrement composé de vers rimés ; las, on devra se contenter d'illustrer ce billet introductif par des galeries de vers dans un registre ancien dont le lent cheminement tortueux nous invite à parcourir ce numéro tant à l'endroit, qu'à l'envers.
Le verre médiéval exhumé par les archéologues se découvre sous des teintes vertes, certainement au grand dam des verriers de l'époque qui, visiblement, peinent à produire un verre transparent.
Quant au Vert-Galant, si en 1578 il n'en porte pas encore le titre et n'est d'ailleurs à cette époque que le roi de Navarre, il est attendu à Toulouse par Catherine de Médicis. Or, la reine ne voit rien venir, si ce n'est le soleil qui rougeoie et l'herbe qui verdoie. Et, verte de rage, elle doit finalement quitter la ville dans une colère noire, sans que l'entrevue tant attendue ait lieu.
Entre cette reine qui voit rouge, et le Vert-Galant au panache blanc, le spectre des couleurs nous amène subtilement à la photographie en couleur, domaine dans lequel le toulousain Jean Dieuzaide, maître du noir et blanc, s'est aussi illustré. S'il a peu travaillé sur plaque de verre et a utilisé majoritairement des pellicules celluloïd, sa longue carrière ne l'aura tout de même pas mené jusqu'à l'ère du numérique.
Ah ! C'est qu'on nous a vendu le tout numérique comme une vague verte, un hymne à l'écologie, qui allait rétablir l'équilibre de la planète. Mais voilà qu'on déchante, il n'en est rien, bien au contraire, et l'envers du décor se découvre désormais.
Au Château-Vert, si on ne conte pas fleurette sur un vert gazon, on s'adonne aux vertiges de l'amour tarifé. Mais tout a une fin, et ce très officiel bordel municipal, où il s'en passe des vertes et des pas mûres, va fermer ses portes au milieu du 16 e siècle, victime d'une révolution des mœurs (une crise de vertu probablement).
La fin se joue à pile ou face : les sceaux anciens ont un endroit et un envers, mais pour briller en société – oui, on croise parfois des spécialistes de sigillographie dans les réceptions pincées – il vous faudra utiliser les termes d'avers et de revers sous peine de passer pour un sombre ignorant.
Cuisine collective. Années 1920-1930. Joseph Saludas - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 1Fi5574.

Je bous


janvier 2023
Tel un liquide porté à 100°, je frémis d’impatience à l’idée de vous présenter le programme du n°138 d’Arcanes. Nous plongerons d'abord dans l'histoire de la ligne aérienne de l’Aéropostale vers l’Amérique du Sud, grâce au fonds Amédée Jayet, en faisant escale à Barcelone, sans oublier Dakar - patrie du boubou.
L’ébullition se poursuivra autour des vapeurs et évanouissements retranscrits dans des procédures judiciaires d’Ancien Régime, où l’on verra qu’ils peuvent avoir comme origine un choc tant moral que physique.
Nous resterons à l’état gazeux pour parler ectoplasmes, mais aussi fantômes bien physiques, que l’on rencontre disséminés sur les étagères des magasins d’archives. Grâce à eux, vous pourrez retrouver, comme un moderne Petit Poucet, le chemin qui mène des lieux de stockage à la salle de lecture des Archives.
Contrairement à la famille dudit poucet, les parents abandonnent rarement leur bout de chou - même si parfois ils en rêvent. Ils les confient plutôt à des professionnels, notamment durant leurs heures de travail. Ainsi, à l’instar de la Manufacture des Tabacs de Toulouse, les grandes entreprises mettent en place des crèches pour accueillir les rejetons de leurs employés.
Il faut croire que les archéologues sont restés de grands enfants, et plutôt que de rester dans leurs bureaux, ils préfèrent aller patauger dans la boue. Ils sont néanmoins de véritables experts dans la caractérisation de ces roches sédimentaires détritiques que l’on trouve - entre autres - dans la région toulousaine, connues sous le terme géologique de « molasse ».
Et d’ailleurs, si vous vous sentez un peu mollasson en ce début d’année, pourquoi ne pas faire une cure « détox » en consultant les ressources en ligne sur l’histoire du thermalisme en Occitanie. Entre sources chaudes et bains de boue, ce pourrait être un véritable bain de jouvence pour vos méninges.
Marché d'Intérêt National de Toulouse, Vue prise lors de la construction des égouts. Tirage noir & blanc, 18 x 24 cm. 9 mars 1955. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 2Fi3183.

Histoires d’eau, de fuites et de tuyaux


décembre 2022

Avec un tel titre, d’aucuns pourraient penser que l’on voudrait faire ici référence à de très hypothétiques fuites d'eau dans le bâtiment-réservoir des Archives.
Grossière erreur, car nous voudrions seulement évoquer une lame de fond qui, durant le cours de l’année écoulée, vient d’entraîner une fuite certes, mais qui est sans conséquence aucune pour nos documents d’archives, car il s’agit d'une fuite des cerveaux.

Répondant à l'appel du large, S., est la première à être partie voguer. Elle fait désormais escale à Montauban, et depuis son bureau du musée Ingres-Bourdelle, elle surplombe et domine le Tarn indomptable.
Puis vint M.-H., qui a choisi de surfer gaiement sur des courants informatiques afin de concevoir des sites web.
G. quant à elle, après une trop courte escale parmi nous, est allée rejoindre son port d'attache à Marseille.
Enfin, il est dit que le capitaine ne coulera pas avec le navire, puisque R. vient de céder la barre à d'autres afin de changer de cap et de se plonger à corps perdu dans des bas-fonds où les sombres galeries humides sont le royaume d'enchevêtrements de tuyaux, de coudes et de siphons.
Par anticipation, il nous faut aussi dire au revoir à D., qui dans quelques jours traversera les mers et les océans pour aller rejoindre le « pays du matin calme ».

À tous, nous souhaitons évidemment bon vent, des courants favorables et de très belles escales.

Portrait d’un homme devant la télévision, 2 mars 1979, négatif N&B, 3,6 x 2,4 cm. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Finc.

Vu à la TV


novembre 2022
Vous souvenez-vous de ce macaron qui fleurissait dans les journaux et les publicités, il y a quelques décennies, et qui donnait censément une crédibilité à la pierre du Kampuchea, qui vous apportait bonheur et prospérité, ou au hachoir Kut, qui coupait aussi bien vos légumes que votre pelouse ? La tendance s’est largement retournée et, à l’ère de la crédulité supposée, a succédé celle de la méfiance généralisée. Peut-être pourrait-on créer un nouveau label pour rétablir la confiance ? Ce serait « Vu sur le site des Archives de Toulouse » et Dieu sait qu’il y a beaucoup à voir. Pas besoin d’être geek, ou même archiviste, pour y accéder grâce à la nouvelle interface de consultation des documents iconographiques qui met à disposition plus de 120.000 images numérisées.
Submergé par ce flot de photographies, plans et autres estampes, vous pourriez être pris d’une ivresse qui n’aurait rien d’éthylique. A ce sujet, des études ont montré que la consommation d’alcool chez les femmes avait régulièrement augmenté ces derniers temps pour se mettre au niveau de celle des hommes. Mais cela ne date pas d’hier et l’ivrognerie est loin d’être un hobby strictement masculin, au regard des procédures criminelles des Capitouls. En revanche, si vous voyez flou à jeun, c’est que vous avez sûrement besoin de consulter un bon ophtalmologiste, profession millénaire, en témoigne un cachet d’oculiste de l’époque romaine. Quant à moi, je peux témoigner qu’un rendez-vous chez l’un de ces praticiens peut souvent vous renvoyer aux calendes grecques.
Notons au passage que le terme calende, qui a donné par la suite le mot calendrier, fait référence au premier jour du cycle lunaire. Car l’observation des étoiles fait partie, avec la soulographie, des occupations favorites des humains depuis la nuit des temps. Preuves en sont les différents observatoires bâtis à Toulouse et au Pic du Midi depuis le 18e siècle. L’important étant, pour que la vue soit la meilleure possible, de bien choisir le site. De même, si vous souhaitez construire un hôtel, autant le faire à proximité du chemin de fer ou de canaux, tel l’hôtel Victoria installé près de la gare Matabiau et de l’écluse Bayard sur le canal du Midi. En revanche, voyageurs, ayez la plus grande méfiance des motels un peu isolés, surtout si le gérant se promène la nuit attifé comme sa génitrice, un couteau à la main. Il y a des chances que ce ne soit pas pour émincer des oignons…
Test de charge au moyen de sacs lestés, passerelle du chemin de fer, face à l'impasse de la Baraquette et la rue Raspail. 17 janvier 1908. Cliché Marius Bergé – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 85 Fi 1980.

Emballages personnalisés


octobre 2022

Avant le règne du sachet plastique (certes sur le déclin) frappé de la marque, du logo, du slogan ou de tout autre signe distinctif de l’enseigne qui vient de réussir à vous vendre son produit vedette, le transport de certaines marchandises ou de provisions nécessitait évidemment des emballages adaptés. Le plastique n’a pas inventé le pochon (loin de là !), il l’a simplement généralisé et banalisé.
En ignorant le plastique, ce numéro spécialement consacré aux emballages pourra vous sembler déroutant en offrant des allers et retours dans le temps, dans les matériaux ou les matières. En effet, loin de se présenter comme un emballage soigné, les courts billets qu’il contient procèdent plus d’un grand déballage où tout vous est livré en vrac. Et c’est aussi bien : il y en aura pour tous les goûts.
Si on ne parlera pas ici de futailles, de bouteillons et autres barriques pour les liquides ou pour le poisson séché et salé, certains vous emmèneront tout de même à la découverte de ces produits au moment de la pesée ; d’autres vous renverront à l’Inquet et son déballage de bric-à-brac.
On trouvera aussi une curieuse évocation des caissons de bois qu’affectionnaient particulièrement les archéologues. D’ailleurs, celui qui illustre l’article pourrait être nommé « boîte crânienne ». Nous passerons sans transition, ou presque, à l’habillage de notre base de données en ligne. À ceux qui n’auront pas encore perdu le fil, on proposera aussi quelques lignes incongrues consacrées aux vrais-faux actes notariés.
Bien entendu, archives oblige, il fallait consacrer quelques lignes à nos boîtes de conditionnement et à nos emboîtages sur mesure alignés sur nos rayonnages : vous lirez une petite ode au « celloderme pH neutre avec réserve alcaline ».
Emballant non ?

Portrait en buste de profil de Jane-Rachel Dieulafoy, née Magre, archéologue, femme de lettres, épouse de Marcel-Auguste Dieulafoy. Eugène Pirou - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 1Fi5803.

Pour l'amour... du risque


septembre 2022
Jonathan et Jennifer ont bel et bien existé. Et, comme toutes les stars dont la banale Amérique s’inspire, ils sont toulousains.
Galanterie oblige – et malgré que la féministe héroïne en eût –, commençons par Jennifer. Elle porte bien un prénom commençant par J. Élevée au couvent bien avant de l’être au grade de chevalier de la Légion d’honneur, le brillantissime tempérament troque, à l’âge de 18 ans, la foi en Dieu pour un Dieulafoy. Vous l’avez reconnue : c’est Jane.
Venons-en à Tarzan, le polytechnicien. Autant elle s'appelle Jane et porte des pantalons, autant il s'est vu disputer la culotte. Le marcel lui restant visiblement incontesté, il en fit son prénom : c’est ainsi que nous le nommerons.
D’ailleurs, enfilez le vôtre, car c’est dans les chaleurs de la Perse que se déroule l’intrigue de ce couple pour le moins… intrigant. Ces passionnés d’orientalisme, après bien des péripéties, et par le truchement du médecin Tholozan (mais puisqu’on vous dit bien que toutes les stars viennent de chez nous ?), obtiennent en 1881, par la griffe du Shah d’Iran, l’autorisation de fouiller notamment le site de Suse, qui fera leur renommée scientifique. Mais, loin de s’en friser les moustaches, le Shah leur reprochera d’y avoir un peu trop mis leur patte en emportant les trésors en France.
Curieux destin que celui de ces Bonnie & Clyde de l’orientalisme, et figures engagées du patriotisme : leur passé d’archéologues révolu, les affaires reprendront bon train, avec un Marcel nommé responsable du contrôle des chemins de fer du Midi, et une Jane, toujours aussi culottée, recyclée en écrivain-conférencière à succès, artiste, cofondatrice d’un prix Femina qui ferait passer l’académie Goncourt pour une piètre… pantalonnade. La ville de Toulouse a rendu hommage aux deux époux en 1937 en attribuant leur nom à une rue. Pompertuzat, dont Marcel fut maire et où Jane repose depuis 1916, a attribué sa rue principale à Jane, dont le nom – fait exceptionnel pour une femme – orne le fronton du monument aux morts.
J’allais oublier : Jane et Marcel se sont connus en 1869, année… qui préfigurait d’un siècle celle d’un autre couple sulfureux. Je n’en sais plus les noms, mais ils ont forcément une consonance toulousaine.
Concours départemental de labour à Villemur (31), 18 septembre 1961. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi5031.

Drôle d'air


juillet-août 2022

C’est la tête encore pleine de la musique du festival Faites de l’image que j’entame ce numéro champêtre et musical. Quelles soirées ! Vous êtes venus nombreux profiter des événements proposés aux Archives et alentours. Le quartier paraissait une île dans la ville, vers laquelle le monde convergeait. Un havre d’ambiance bon enfant.

Mais revenons sur-le-champ au thème qui nous occupe ce mois-ci. Enfin… sur-le-champ ou sur le chant ? C’est bien Oiseau ornant la lettrine du premier moulon de la matrice cadastrale du capitoulat du Pont-Vieux, 1680-1795. Mairie de Toulouse, Archives municipales, CC92 (détail).cette même question que les habitants de la rue du Chant du Merle ont dû se poser voici 150 ans. En effet, Jean Coppolani raconte que le nom de cette rue provient de la déformation de « champ de Merle », à savoir un champ qui aurait appartenu à un dénommé M. Merle au 18e siècle. Ce chemin apparaît bien sur le plan de 1808, non loin de la Baraquette. Son nom semble relever de l’usage pendant de nombreuses années : « chemin dit Champ du Merle » en 1867, « chemin dit Chant du Merle » en 1870, « rue Cant del Merlé » en 1872, « del Camp del Merlé » en 1876. Bref, un remix de sonorités proches qui change à tout bout de champ !

Le nom de cette rue n’en reste pas moins mélodieux. Et, nul doute que cette douce chanson vous accompagnera tout au long de ce numéro. Qu’il s’agisse de chant ou de champ, ils vous donneront une envie folle de chanter, de fredonner ou de prendre la clé des champs !

Fête au Faubourg Bonnefoy (1931). Alexandre Gril – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 34Fi1027.

Prêts à tout, grands fous ?


juin 2022

Le décompte des jours s’accélère. Nous l’attendons depuis des mois et il est désormais tout près. Quelle excitation ! Quand il sera là, le temps disparaîtra, comme figé. Quoique disparaître ne soit pas le bon mot... Au contraire, il s’affichera en gros, en TRES GROS ! S’imposant à nous à travers des images fixes et mouvantes. Un temps f(l)ou mis à l’honneur de cet événement.

Pendant deux soirées, les vendredi 1er et samedi 2 juillet, projections, musiques, installations, expositions, ateliers, conférences empliront vos yeux et vos cœurs. Un beau défi que d’accueillir et de nous associer à l’association Les Vidéophages pour ce 21e festival Faites de l’image !

Nous ne vous prêterons rien ces soirs-là. Bien modestement, nous vous donnerons juste à découvrir autrement ce lieu, gardien de la mémoire du temps. Jusqu’à la dernière minute, nous nous apprêtons dans l’ombre à vous révéler les faces cachées des archives. Nous sommes presque prêts… Et nous nous amusons comme des petits fous à vous concocter ces surprises !

Si vous êtes curieux, si vous êtes joueurs, si votre âme, à l’image du temps, est un peu folle, ce rendez-vous est fait pour vous !

Le 19 novembre 1985. Gros plan de face de la styliste Anne-Marie Beretta. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi2874.

Rond, melon ou claque, à vous de choisir !


mai 2022

Dans cet Arcanes qui s'engage, je vais vous dire qui est le sujet, le véritable sujet.

Un sujet à prendre par le haut (fût-il « -de-forme »). Avec finesse, élégance.

À Toulouse, deux rues l'ont évoqué, même si une seule persiste et signe.

On le porte en grâce ; on le perd en disgrâce. Comme si, tombé dans la prison Saint-Michel, on l'avait troqué contre un matricule.

Quand il est bas, il fait pourtant honneur à celui (et, quelques lignes plus bas, à celle) qui n'en porte pas.

On travaille parfois de lui, fût-ce chez Brosson.

J'ai même connu un gars qui avait le front tellement ridé que pour mettre le sien avant un coup de vent d’autan, il le vissait !

 

Ce sujet, c'est le chapeau.

 

Ne m'en voulez pas s'il s'est laissé devancer, dans cet édito, par une autre forme d'élégance, teintée de féminisme pour l'occasion. Car une autre façon de « porter chapeau », socialement parlant, c'est parfois de porter une casquette : stylé ! Ou plutôt canon, comme on dit chez Beretta...

Vue des bûchers du Port-Garaud représentés sur une vue d'ensemble de Toulouse [2e moitié du 17e siècle]. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 45Fi74 (détail).

Feu les bûchers


avril 2022

Comme le racontent certains, Jeanne d’Arc aimait beaucoup le poisson. La preuve, sur le bûcher, elle répétait « Je veux des sandres ! Je veux des sandres ! ».

Cette plaisanterie pourrait s’appliquer à bien d’autres condamnés à être brûlés vifs, tels l’empoisonneuse Marie Dejean en 17701 ou le pyromane Jean Unglas en 17732. Bien qu’à Toulouse cette pratique soit attestée jusqu’à la fin du 18e siècle, la toponymie actuelle pourrait laisser croire qu’elle se serait déroulée quartier Saint-Michel, non loin de la Garonne. Que nenni ! L’actuelle rue des Bûchers, nommée ainsi depuis le 18e siècle, tire son nom du bois de pagelle (bois de chauffe) ou à bâtir (d'œuvre) amené par radeaux ou par flottage sur la Garonne, au Port-Garaud. « Les radeliers accostent là, sur la rive. Avec l'aide de travailleurs du port et de portefaix, ils déchargent leur cargaison de bois et bien souvent désassemblent les radeaux dont les troncs sont vendus, les pagelleurs mesurent le bois à brûler, et les charretiers vont le livrer dans la ville. Des bûchers sont élevés pour stocker les amas de bois en attente de livraison. Un garde appointé par les marchands et assermenté par les capitouls veille nuit et jour sur tout ce bois qui suscite évidemment les convoitises. Mais il revient aux marchands d'élever leurs bûchers sur le port, tout en assurant la libre circulation et en veillant à ne pas empiéter celles de leurs voisins »3. Les bûchers destinés aux condamnés à mort étaient installés plus loin du fleuve, initialement sur la place Arnaud-Bernard ou sur la place du Salin, puis à partir du 16e siècle place Saint-Georges.Statue de Jeanne d’Arc sur le bûcher [fin 19e - début 20e siècle]. Giscard - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 46Fi229.

Si Jeanne d’Arc avait été exécutée à Toulouse, elle n’aurait pas eu le loisir d’aller goûter une dernière fois la chair de ce poisson d’eau douce en dévalant la pente jusqu’à la descente de la Halle-aux-Poissons. Trop ligotée me demanderez-vous ? Pas seulement. La halle aux poissons n’y a été installée qu’un siècle plus tard...

 

Comme en témoigne ce numéro, nous, archivistes, petites poussières dans l’histoire d’aujourd’hui et de demain, nous lutterons toute notre vie contre la poussière désireuse de réduire en cendres les sources de l’histoire. A la chasser, nous finirons peut-être par constituer une couche de limon, très fine et volatile, grâce à laquelle, par un cercle vertueux, nous pourrions cultiver quelques patates, patates elles-mêmes réduites en poussière pour le bien du patrimoine photographique.

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1. B.M.T., Ms. 704, p. 122.
2. B.M.T., Ms. 704, p. 205.
3. Archives municipales de Toulouse, « Les bûchers du port Garaud », Procédures criminelles à la carte, (n° 20) décembre 2021 publication en ligne

Plan de la ville et des faubourgs de Toulouse (1774). Nicolas Chalmandrier, Jean Lattré - Mairie de Toulouse, Archives municipales, II684.

Banco, c’est le bon coin !


mars 2022

A certains moments dans la vie, nous n’en pouvons plus. Alors, quand retentit un « au coin, à gauche », quel soulagement ! Des heures que cela durait ! Ah non, aucun lien avec un bambin remuant et braillard qui se verrait intimer l’ordre de rejoindre l’angle de la pièce pour s’assagir. Ni même une indication sur la localisation des petits coins qui, c’est bien connu, sont toujours au fond du couloir à gauche. Mais bien une indication donnée à une personne complètement perdue, cherchant son chemin. Attention cependant à savoir de quel coin nous parlons.

En effet, au cours des siècles passés, cette appellation était fréquemment usitée : le coin des Lagagnous, le coin de la Creu, le coin de la Roquette, etc., autant de lieux aujourd’hui identifiés uniquement par le nom de leurs rues. En témoignent les déclarations faites dans les dossiers de procédures criminelles des capitouls : le déposant est formel, il a vu ledit individu coin de Tanus. Ah oui ? Vous avez dit où... ? Cela a un lien avec le café du coin ? Pas vraiment… Et avec Thanos ? En vieux français, on ne sait jamais… Ces coins ne sont que très rarement représentés sur les plans de Toulouse. Pour autant, la terminologie perdure jusqu'au moins le début du 19e siècle puisqu'ils figurent parmi les noms de rues employés dans les recensements de population. C'est ainsi qu'en 1823, rue Chaude et coin Chaud apparaissent de façon distincte, alors qu'aujourd'hui, ces deux tronçons constituent l'actuelle rue Jean-Suau.

Pour ne pas tourner en rond lors des recherches de coins, nous explorons tous les recoins des dossiers de l’époque pour les localiser. Plusieurs coins sont déjà identifiés en ligne. Mais beaucoup d’autres existent, intégrant d’un interlocuteur à un autre quelques déformations de prononciation, histoire de corser l’identification.

Vous l’aurez compris, à Toulouse, il y a des coins (et parfois même des coings) dans tous les coins !

Salon Rouge, salon du maire depuis la fin du 19e siècle (2016). Stéphanie Renard - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 4Num11/6.

Le comité secret


février 2022

Secret et action publique ne s’affichent guère ensemble. La transparence est de mise, et l’accès aux archives y participe grandement. Preuve que tout peut se savoir : les séances des conseils municipaux sont publiques, et les délibérations sont accessibles à tous. Pas besoin d’espionner par le trou de la serrure, la porte est grande ouverte ! Sauf quand… Chut… Ouvrez vos yeux et fermez vos oreilles…

Extrait de la délibération du 21 juillet 1903. Mairie de Toulouse, Archives municipales, PO1/1903/11.

Eh oui : là, comme dans beaucoup de domaines, l’exception confirme la règle. La loi municipale de 1884 prévoit déjà, sous certaines conditions connues de tous, que le conseil municipal peut se réunir à huis clos. Le recours à cette mesure reste extrêmement rare. Cela fut notamment le cas à Toulouse le 21 juillet 1903. La séance publique est levée, et le conseil se réunit en comité secret pour débattre de divers points parmi lesquels figurent « Bourse communale à l’Institut des sourds-muets ». Ce qui s’est dit alors n’est connu de personne, en dehors des personnes impliquées. Et, de mémoire d’homme, aucun des bénéficiaires n’en a jamais parlé !

Les communes ne sont pas les seules à être autorisées à user de ce procédé. Le Sénat l’a également pratiqué à 4 reprises entre 1914 et 1916. Cependant, la reproduction des comptes rendus de ces comités secrets ont été publiés... en 1968 !

Dans ce numéro, nous levons le voile sur plusieurs secrets, tout en vous expliquant pourquoi, aux Archives, nous protégeons certains secrets, vos secrets.

Point de secret entre nous ! 

Vue panoramique du pic d’Ossau dans les Pyrénées (25 avril 1911). Ludovic Gaurier - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 67Fi92.

Une petite virée, tout schuss


janvier 2022

En découvrant le thème de ce mois, les esprits les plus tortueux ne pourront s’empêcher de se poser LA question. Qui a inventé le virage ? Les sources ne nous renseignent guère. Plusieurs hypothèses sont envisageables : cet individu ne marchait pas droit et il a mal tourné, ou alors il s’agit d’un flâneur appréciant de faire les choses sans hâte, en prenant son temps... car tout le monde le sait, le plus court moyen d’aller d’un point A à un point B est la ligne droite !

Ce dilemme se retrouve dans la pratique du ski. Les uns prennent de larges virages, amples et sinueux tandis que les autres descendent tout schuss. A croire qu’ils ont le feu aux fesses ! Presque... En effet, en allemand, Schuss signifie coup de feu, et lorsqu’un skieur doit accélérer, son entraîneur lui crie « schuss » afin qu’il soit aussi rapide qu’une balle de pistolet. Le terme est aujourd’hui largement employé, même pour motiver nos chers bambins.

Comme en témoigne ce numéro, il existe bien des façons d’aborder les virages, il y a ceux qui les prennent pour arrêter de tourner en rond, ceux qui les observent en appréciant la variation de couleurs qu’ils offrent, ceux qui les ratent et finissent au fossé, ceux qui permettent que nous les prenions en toute sécurité et ceux qui préfèrent les enchaîner en réalisant des tours et des tours de circuit.

Avant de boucler votre journée, venez faire une petite virée avec nous !

Nationale 113 depuis la route de Narbonne à Toulouse jusqu’au rond-point de Ramonville (1977). Pôle image de la Direction de la communication – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 2Fi2228.

Nom Dedieu !


décembre 2021

Les voix du Seigneur sont impénétrables, c'est bien connu ! Certains vous diraient qu'il en est de même avec les voies de Toulouse, très encombrées aux heures de pointe... Nulle critique dans mon propos, Dieu m'en préserve. Dans aucun cas, je ne voudrais pousser le bouchon trop loin !

Bref, la prochaine fois que vous vous ennuierez dans les embouteillages – à Toulouse ou ailleurs – et que vous ne voyez plus aucun détour ou recours possible, je vous invite à regarder les noms mentionnés sur les plaques de rues. Les uns vous feront sourire, les autres vous laisseront de marbre.

Sans aucun doute, certains ont été inspirés par la grâce divine ! Il en est ainsi d'une rue située à deux pas des Archives : la rue Dieu. Rien à voir avec le Dieu du Notre Père même si, en 1914, une tentative de modifier le nom en « rue Parant » a avorté. L'origine de ce nom est beaucoup plus terre à terre : il s'agit de la déformation du nom des propriétaires des terrains situés à l'emplacement de cette rue nouvelle dans les années 1880 : la famille Dedieu. Illustration des migrations ariégeoises vers le bassin toulousain, à l’instar des Clarac, Arabeyre, ou encore… Bergued[i]eu ! Le nom a ensuite été déformé pour devenir la rue Dieu, dès 1904. Et ne croyez pas qu'habiter rue Dieu relève du miracle car, en ce domaine, une autre rue s'est déjà positionnée !

Avant de vous lancer dans la lecture de ce numéro, je préfère vous mettre en garde : il risque fort de vous faire perdre l’esprit. D’un dieu de la photographie à l’archiviste qui pourrait se prendre pour Dieu, tous les ingrédients – même le vin ! – sont présents pour vous enivrer.

Sur ce, je vous en remets à Dieu !

Feu dans un brasero (27 janvier 1968) – Jean-Paul Escalettes. – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 42Fi3347 (détail).

Prendre la pause méridienne


novembre 2021

S'installer confortablement devant un bon feu et faire une pause… Une activité séduisante par les froids qui courent. Bien plus qu'un instant de bonheur, plongé dans la chaleur du feu, ce moment offre une suspension salutaire dans la course effrénée de notre quotidien. Faire un arrêt sur image, prendre le temps d'observer, de nous réaligner avec l'axe structurant de notre vie, de ressentir quelle direction prendre. Puis repartir, fort de l'énergie accumulée.

Il en est de l'axe de notre vie comme des voies de communication qui nous entourent : se perdre dans les ruelles ne nous mène nulle part si nous boudons l'axe majeur de circulation. De même, tel un essieu, ou la tige principale d'un végétal, cet axe sert d'appui aux éléments, plus petits, qui s'y raccrochent. Bref, prendre le temps d'une pause pour ne pas être désaxé !

Pour ne pas perdre le nord, les étoiles peuvent également être de bon secours. Direction l'observatoire de Jolimont, et plus précisément, la coupole du « cercle des passages ». Depuis 1891, elle abrite la lunette méridienne, un instrument mesurant la position des astres grâce à l'instant de passage et la hauteur de l'astre au-dessus de l'horizon. Cette mesure est effectuée dans le plan méridien du lieu, plan dans lequel se situe le soleil à midi solaire.

Et si flâner dans le quartier de Jolimont ne suffit pas, ce numéro d'Arcanes devrait ouvrir de nouveaux horizons : pousser jusqu'à la gare Matabiau pour prendre le large (en n'oubliant surtout pas votre déodorant !), se défouler en lançant des haches, à la façon autorisée au 21e siècle, ou retabletter jusqu'à épuisement !

Pour ma part, vous l'aurez compris, je préfère opter pour la méridienne au coin du feu ou la méridienne céleste, qu'importe l'heure de la journée ou de la nuit.

Tas de sables et embarcations de pêcheurs de sable au port Viguerie (années 1900). Henri Laffont – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 18Fi173 (recadrée).

A la pêche au… sable


octobre 2021

Et si nous partions pour un petit tour en barque ? Naviguer sur les eaux de la Garonne et faire escale au port de la Daurade ou au port Viguerie, ça vous tente ? L’époque à laquelle nous ferions cette excursion ne comptait pas de kayakistes et déjà le trafic fluvial de grande ampleur avait été dévié vers le canal du Midi. Nous croiserons donc surtout des bateaux lavoirs, des bateaux de pêche ou d’autres équipages comme le nôtre.

L’embarcation sur laquelle je vous propose de prendre place est une petite barque à fond plat, très effilée. Si votre forme physique laisse à désirer, mieux faut que vous mainteniez le bateau car l’activité qu’on y mène nécessite grande force. Nous ramènerons de notre expédition dans le passé plusieurs mètres cubes de sable, dragués du fond du lit de la Garonne. Ici, pas de pelle mécanique. Nous ne procéderons qu’à la force des bras. Il ne s’agit pas en effet d’une « promenade » ou d’une « joyeuse équipée » mais bien d’une activité harassante, encore pratiquée sur certains fleuves du monde.

Si vous observez bien autour de vous, ce sable est encore présent dans les rues de Toulouse. Pas à Toulouse plage ou dans les bacs des aires de jeux ! Mélangé à de la chaux ou du ciment, il a été utilisé pour la construction des bâtiments.

Certains ont sublimé ce sable en le photographiant, d’autres jouent avec ou encore le taille une fois transformé. Et même si aux Archives nous aimons jouer, vous ne trouverez aucun grain de sable dans nos collections !

Photographie aérienne du quartier du Capitole, Saint-Georges, Saint-Aubin, les Carmes, Saint-Etienne et le Busca (1984) - SPHAIR. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 50Fi109.

Titivillus à tous les coins de rues


septembre 2021

Connaissez-vous Titivillus ? Il ne s'agit pas du gentil titi de la ville d'à côté, mais d'un démon ! Rien que ça ! Le démon des copistes, éprouvant un malin plaisir à susurrer à l'oreille de ses victimes… Il est le véritable responsable de toutes les « fautes d'étourderie » présentes dans les écrits. Bref, un démon qui ne chôme pas par les temps qui courent !

Des preuves ? Il en existe à tous les coins de rues. Par exemple, la rue du Canard pourrait tirer son nom de Michel Cognard, conseiller au sénéchal et potentiel propriétaire en ce lieu vers 15801. Titivillus a fait le reste ! La rue du Canard n'est pas la seule à avoir souffert de ses facéties. La rue du Chant-du-Merle s'appelait, au 18e siècle, la rue du Champ-de-Merle. Elle traversait, comme son nom l'indique, la propriété d'un certain M. Merle. Ce n'est que vers 1860 que le nom prend sa forme actuelle2. A moins que M. Merle siffle aussi bien que son homonyme ailé, ce n'est pas la même chanson !

Depuis plusieurs décennies, les dénominations des voies font l'objet d'une délibération du conseil municipal. Un bon moyen de fixer un nom une bonne fois pour toute ! Enfin, ceci sans compter sur Titivillus... Par exemple, si vous vous penchez sur la généalogie de la rue Jean-Pierre-Blanchard, vous constaterez qu'elle se nomme ainsi depuis 1995 et qu'auparavant – depuis 1936 – il s'agissait de la rue François-Blanchard. François aurait-il un frère, un cousin ou un fils dont la notoriété l'aurait détrôné de sa plaque ? Eh non ! Titivillus avait encore frappé ! Et près de 60 ans après l'attribution de la dénomination, l'erreur de prénom a été corrigée3.

Enfin, il faut reconnaître que Titivillus a parfois bon dos… De l'étourderie à l'escroquerie, il n'y a parfois qu'un pas ! Les escrocs et falsificateurs en tout genre se feront sonner les cloches (enfin, si elles sont accessibles…) et, une fois gravé dans le marbre, leur nom passera à la postérité, avec ou sans coquille.

1. Pierre Salies, Dictionnaire des rues de Toulouse, voies publiques, quartiers, lieux-dits, enseignes, organisation urbaine, Toulouse : Milan, 1989, 1174 p. (2 vol.).
2. Jean Coppolani, Fichier des noms de rues, alimenté jusqu’au début des années 2000.
3. Jean Coppolani, Fichier des noms de rues, alimenté jusqu’au début des années 2000.
Salon Rouge, Hôtel de Ville du Capitole, Place du Capitole. 7 décembre 1985. Plan taille, vue de face, Dominique Baudis, maire de Toulouse reçoit Coluche (Michel Colucci), humoriste à l'occasion de la création de l'association « Les Restos du cœur ». Francis Alexandre - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 2Fi4500.

« Quand je pense à moi, je pense à toi(t) »


juillet-août 2021
La thématique tombe à point nommé, sous l’effet (et à l'inverse...) de la pluie estivale.
Un toit, ça peut être une œuvre d'art et une source de rêverie. Lisez ce numéro. Si rêver, c'est s'évader, n'en faites pas trop quand même... « La tuile ! » se serait écrié François Burnet, antihéros de haut vol que vous découvrirez ici.

Mais « toi », c'est aussi la solidarité. Si nous n'avons pas la place de rappeler tous les services que rendent les Archives, vous débusquerez, en fin de numéro, les dernières facilités dont nous comblons régulièrement nos lecteurs.

Nos fonds (de solidarité !) abritent aussi quelques souvenirs de figures nationales. Rappelez-vous : « Toi que fais-tu pour les sans-toit ? » / « Sans toi, ils sont sans soit » : en décembre 1985, l'abbé Pierre était reçu au Capitole. Deux jours avant, c'était Coluche qui, lançant les Restos du cœur, recevait les mêmes honneurs : « Quand je pense à moi, je pense à toi ».
Et, sans le savoir, tous deux rendaient ainsi service à ce numéro d'Arcanes !
Portrait en pied d'un ouvrier de la boulangerie du bureau de bienfaisance posant au milieu d'étagères à pain, 1938-1940. Marius Bergé - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 85Fi685.

Flûte, ma baguette !


juin 2021

Une chocolatine et un pain au chocolat ! Comment ça, c'est la même chose ?! En arrivant à Toulouse, j'ai pourtant cru comprendre qu'un pain au chocolat, cela n'existait pas ! Pour autant, demandez l'un ou l'autre dans n'importe quelle boulangerie de France et il est fort probable que l'on vous serve la viennoiserie convoitée.

Et si je vous demande une « flûte », vous me servez quoi ? Si la réponse vous semble évidente, vous en mangez sans doute rarement. Préféreriez-vous, pendant vos escapades estivales, un régime 100 % chocolatine ? Ce ne serait pas très « régime » tout ça… Flûte alors, vous voici démasqués !

En région parisienne, une flûte correspond à un pain de 200 g, et la baguette à un pain de 250 g. Les poids s'inversent en Seine-Maritime. Et ils s'envolent en Haute-Loire où la flûte pèse 400 g. Du simple au double ! Autant le savoir avant d'envoyer vos enfants chercher 3 flûtes…

En 1981, une tentative d'uniformisation des appellations est apparue comme par magie. Aucun succès. À croire que la baguette employé était celle d'un chef d'orchestre et non celle d'un magicien. À moins que le bois employé n'ait pas les qualités requises ou que le lieu de l'invocation n'ait aucun lien avec le grain ? Dans tous les cas, les usages locaux ont affirmé qu'ils ne se laisseraient pas mener à la baguette !

Jour de repos sur le Tour de France : Lucien Tesseire et René Vietto lors d'une partie de pétanque à Toulouse, [13-14 juillet] 1949. André Cros – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi6554.

Rouler sans perdre la boule


mai 2021

Un coureur cycliste à plat ne va pas très loin. Alors, pour éviter les coups de pompe et le remettre en selle, rien de tel qu’une journée de repos.

En 1949, René Vietto court son dernier Tour de France. Sa légende n’est plus à faire. Et, bien qu’il n’en ait gagné aucun, il a conquis le cœur des foules en sacrifiant, lors du Tour 1934, ses propres chances de victoire au profit du leader de son équipe, Antonin Magne. Il finira même second de cette épreuve en 1939 ! De quoi avoir les boules !

Mais alors, que peut faire un tel homme quand il a l’occasion de descendre de son vélo ? Manger des boules de glace ? Danser sous les boules à facettes ? Se rouler en boule en attendant le lendemain ? Eh bien non, il fait rouler des boules de pétanque avec ses compagnons de route !Jour de repos sur le Tour de France : quatre hommes accroupis observent le genou de René Vietto, [13-14 juillet] 1949. André Cros – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi6553.

Pour sûr, cet homme n’était pas bidon : il a apporté de nombreuses améliorations techniques, toujours utilisées dans la discipline. Et qu’importe si certains ne sont pas d’accord : cela lui fait une belle jambe ! Si, si, regardez !

A n’en pas douter, les amateurs de boules trouveront leur bonheur dans ce numéro. A votre convenance, vous pourrez en faire une partie au boulingrin, faire la ribouldingue, vérifier si votre bonheur ne tient qu’à une boule ou vous promener dans Toulouse à la recherche de la rue de la Boule. Et, malgré ce que pourrait vous dire un colporteur, il est fortement déconseillé d’ingurgiter ces boules d’acier : la limaille de fer est mauvaise pour la santé ! Même pour les boulimiques !

Reproduction d'un dessin d'enfant, 1964. Jean-Paul Escalettes - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 42Fi2205.

En formes


avril 2021

Tampon ?! C'est bien un thème d'archiviste ça ! Froid comme la mort... La seule évocation de ce nom suggère le bruit sec du tampon encreur s'abattant sur une feuille, l'impersonnalité d'un nom ou d'une date dupliquée à l'infini sur des papiers administratifs tout aussi impersonnels.
Pourtant, rappelez-vous vos premiers tampons... Ceux que vous fabriquiez vous-mêmes à l'aide d'une pomme de terre sculptée. Une fois imbibés de peinture, ces tampons de fortune faisaient naître des formes colorées sur votre feuille, les murs ou le sol pour les plus créatifs. L'angle de pose, souvent hasardeux, et la quantité de peinture leur donnaient leur singularité, pourtant tous liés par un vague air de famille. Un petit quelque chose d'une ribambelle de frères et sœurs s'animant sous vos yeux. La difficulté de sculpter des formes élaborées faisait naître des carrés vaguement ronds, des ronds vaguement carrés et, pour les plus adroits, des cœurs, déclinés sur des petits mots doux glissés aux mamans à l'occasion de la fête des mères.

Si vous manquez d'inspiration pour occuper vos chers bambins dans les semaines à venir, munissez-vous d'une pomme de terre, d'un couteau et de gouache. En partageant avec eux ce moment de créativité, vous (re)découvrirez la chaleur qu'un tampon peut apporter à celui qui l'applique et à celui à qui il est destiné. Faire plaisir, c'est aussi simple qu'une pomme de terre.

Chèvres rue de Metz, vers 1910 - Longi-Bechel (éditeur) - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi6340.

Mélanger la chèvre et le chou


mars 2021

Mesdemoiselles, un peu de shopping ça vous dit ? Si on allait rue de Metz découvrir les dernières nouveautés arrivées tout droit de Paris ? Je chausse mes sabots, enfile mon manteau de poils et j’arrive ! Regarde cette salle à manger ! Bof, c’est pour les vieilles biques... Allons plutôt rejoindre la marchande de choux !Maquette de la partie centrale de la ville de Toulouse, 1935-1950 – Henri Desaigue et Gabriel Franc (auteurs). Mairie de Toulouse, Archives municipales, 2Obj91 (détail).

Plutôt cocasse comme vision, que celle-ci ! Des chèvres en plein centre de Toulouse ! Elle rappelle une époque, pas si lointaine, où l’urbanisation de la ville était beaucoup plus limitée que celle que nous connaissons aujourd’hui. Il suffit de comparer les plans de la ville en 1904 et en 1950 pour visualiser le maillage, de plus en plus dense, des rues. Ou encore, de jeter un œil à la maquette de la ville, réalisée entre 1935 et 1950. La voir dans son entier, en salle de lecture, est encore plus édifiant !

Malgré la présence de nombreux champs, aucun chou n’y est représenté ! Encore moins ceux de Martin, puisqu’ils ont été volés ! Qui est à l’origine de cette disparition ? Les chèvres ? Les pro bouts de chou ? Henri Rachou ? Vous le saurez en lisant notre feuille de chou.

Belote au jardin du Grand Rond, 1981. Direction de la communication - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 2Fi2638.

Trouver l'intrus


février 2021

Quel est le point commun entre tondre un mouton, classer des archives et se faire courser dans la rue ? Vous donnez votre langue au chat ? Allez, je vous donne un indice : mon premier est une activité dont le but est de procurer du plaisir, mon second est employé lorsque l'on s'exprime à l'écrit ou à l'oral, mon tout est un objet qui sert à marquer des points. Ah ! J't'ons pas loin !

Si vous avez les j'tons de ne pas vraiment comprendre toutes les subtilités de ce point commun, je vous invite à prendre votre courage à deux mains et à vous glisser dans tous les sombres recoins de ce numéro. Il est dédié aux joueurs, aux intrépides, à ceux qui jettent l'argent par les fenêtres et à ceux qui veulent épater leurs rejetons.

Moutons marchant sur une passerelle à structure métallique, à localiser, 1955. Jean Ribière – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 41Fi94.

À pas de loups


janvier 2021

Ombres furtives et masquées regagnant leurs pénates avant les 18 h fatidiques ? Comme des moutons, sans savoir vers quelle aventure nos pas irréfléchis nous portent ? Battant la mesure, au pas de course, façon catwalk, mine haute, menton fier et regard déterminé ? Y a-t-il une façon d'entrer dans une nouvelle année ? Le cours des événements, les virus, les pulsions humaines sont-ils sensibles au renouvellement calendaire ? Pourquoi, tout à coup, un chiffre changerait tout ? Pourquoi 2021 serait un « meilleur » millésime que 2020 ? Et surtout, en quoi ? Par exemple, les brebis passeront-elles un meilleur été ? Le ciel – ou tout autre objet insolite – nous tombera-t-il sur la tête ? Aurons-nous l'occasion d'aller explorer les confins toulousains ?

Trop de questions.

Non, vraiment, la seule à se poser est celle des souliers à porter pour rester stables, au chaud, confortables, protégés contre les roulettes des chariots, parés pour avaler les kilomètres de couloirs. Aux Archives, on avance, on marche, on arpente, on circule. Le bâtiment est grand (venez-donc aux Journées du Patrimoine, en septembre), les déplacements y sont fréquents et la manutention régulière. Cette année encore, le volume de documents conservés va croître, les descriptions donneront lieu à des recherches passionnantes, et la base de données s'enrichira de plusieurs milliers d'images et de notices. De belles découvertes en perspective.

Bonne année !

Raoul Berthelé embrassant Emilienne Gosse dans le cou (1918). Raoul Berthelé - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 49Fi1200 (détail).

Des soupirs au désir, il n’y a qu’un pas


décembre 2020

Auprès d'elle, le temps s'arrête. Vos maux disparaissent et un infini de possibles s'ouvre devant vous. Qualités, défauts, peu importe, tout vous plaît, juste comme ça, sans rien enlever, sans rien ajouter. Des moments de bonheur qui reposent sur de l'imperceptible, de l'amour donné sans l'attente d'une contrepartie. Un être exceptionnel à vos yeux dont vous n'avez qu'à croiser le regard pour vous fondre en lui. Soupirs.

Pourquoi soupirez-vous ? Elle ne le sait pas ?! La vie n’est pas une pièce de théâtre ! Alors, si vous ne voulez pas soupirer de regrets, il serait peut-être temps de lui avouer ce que vous ressentez. Qui sait ? Vous pourriez avoir une heureuse surprise... Bâtir des projets ensemble, aller voir Naples ou Venise, lui murmurer « je t’aime » dans un soupir - sans qu’il s’agisse du dernier -, devenir immortel au travers des souvenirs que vous laisserez, vous émerveiller de la beauté des eaux tranquilles du canal du Midi, vous enrichir des rêves de l’autre ou vous jouer de l’histoire en partant élever des oies.

Votre vie n’en sera que plus harmonieuse. Choisissez de vibrer plutôt que de soupirer !

Les capitouls de l’année 1630 siégeant au petit consistoire de l’hôtel de ville, actuellement rez-de-chaussée du Donjon, huile sur parchemin par Jean Chalette. Mairie de Toulouse, Archives municipales, Livre VI des Annales manuscrites, BB 278, chronique 302.

Point d’honneur


novembre 2020

Lorsque sœur Roze aperçoit Catin Varenes, en ce 10 juin 1784, elle sait déjà comment les choses vont tourner. Pour sœur Roze, cette femme n’a point d’honneur. "Foutue jaunisse", "chabalas", "gueusarde", "bougresse" : les quolibets pleuvent sur la sœur grise de la Charité. Catin Varenes n’a qu’une envie "lui baille[r] une bonne estrillade" ! Elle est arrêtée par la garde et jugée par les capitouls, qui rendent leur sentence 5 jours plus tard : elle est condamnée à 15 jours de prison et à une amende de 26 livres. Point final !Costume des sœurs de la Charité issu de Philippe-Joseph Maillart et Jeanne-Catherine Maillart, Collection de costumes de tous les ordres monastiques, supprimés à differentes époques, dans la ci-devant Belgique, Bruxelles : Philippe-Joseph Maillart, [1811]. Bibliotheek biekorf Brugge, FAVA KL.I 357


Du moins... c’est le témoignage historique que nous livre cette procédure criminelle… Car aux Archives de Toulouse, nous mettons un point d’honneur à maintenir une offre à destination des scolaires pendant cette période particulière. Les élèves des classes de CM2, 6e, 5e et 4e sont donc invités à participer à un concours de lecture-écriture "Les voix de la procédure". A travers un jeu de rôles, les élèves jouent avec la langue du 18e siècle et les plus grands sont invités à imaginer les événements qui ont suivi l’exécution de la sentence : Catin Varenes ne s’en arrêtera pas là ! Les inscriptions sont ouvertes jusqu’au 15 décembre 2020. Si vous cherchez un projet vivant à conduire en classe, ce concours est fait pour vous ! Un point, c’est tout !

Portrait de Jules Léotard [1859-1870]. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 15Fi2517 (détail).

Voler comme un Léotard : double coup de génie !


octobre 2020

Tous les sportifs vous le diront : pour être libres dans ses mouvements, rien de mieux qu’une tenue confortable, un peu élastique et bien moulante ! Filles ou garçons, rien de plus seyant qu’un justaucorps, aux couleurs neutres ou flashy, c’est au choix de chacun.

Jules Léotard, l’inventeur du trapèze volant, l’avait bien compris. Et quand il s’élance dans les airs en effectuant un saut périlleux entre deux trapèzes, il ne doit absolument pas être gêné dans ses mouvements par le pli d’un tissu qui se coincerait au niveau des coudes. Il a besoin d’être à l’aise et invente pour ses besoins un maillot collant, désormais appelé un léotard ou justaucorps.
Comme Jules est musclé, cela ne gâche rien… Eh oui, ne porte pas un léotard qui veut ! Mieux vaut avoir le physique qui va avec !

Paris, Rome, Saint-Pétersbourg, Berlin, Londres : les numéros de cirque impressionnent un public international. Ce Toulousain subjugue son public, prêt à se casser le cou pour admirer ses prouesses.

Sauter d’un trapèze à un autre en faisant des pirouettes… quelle idée a bien pu lui passer par la tête ? En tout cas, à coup sûr, c’est un vrai coup de génie !

Mallette ayant appartenu à Jean Robert Calvayrac et contenant des albums photographiques de la guerre 1914-1918 et des photographies de famille. Cliché Stéphanie Renard (2020). Mairie de Toulouse, Archives municipales, Fi non coté.

Ouvrez la malle au trésor


septembre 2020

Entamer des recherches dans les archives, c'est un peu comme se lancer dans une chasse au trésor. Vous ouvrez la malle et… hop ! Vous voici entraînés dans une folle aventure, ponctuée d'indices rocambolesques, de faits inattendus et de parcelles de vie. Vivre une telle expérience vous tenterait, mais vous ne savez pas comment vous lancer ? Vous ne savez même pas où sont les archives ? Bientôt, plus d'excuses...

Trois soldats posant à Berneville, proche d’Arras, en décembre 1915, avec « le masque anti-asphyxiant à la mode à ce moment-là » (2015). cliché Jean Barbier. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 1Num15/1/55.Elles vous ouvrent grand leurs portes à l'occasion des Journées du patrimoine. Une occasion unique d'explorer les coulisses d'espaces non visitables le reste de l'année. Alors, si partir à la chasse au trésor vous tente, lancez-vous ! Vous serez guidés au travers des méandres de la mémoire, dans les profondeurs d'eaux anciennes.
Si vous préférez les sensations fortes, l'atelier « tu ne tueras point mais tu peux toujours essayer » est fait pour vous !  Les archives sont des vieilleries et de ce fait ne vous intéressent pas ? Venez bousculer vos certitudes avec l'atelier « Documents numériques : un archivage presque parfait » et la démonstration du portail sur le patrimoine toulousain UrbanHist. Si en revanche, vous faites partie de nos fidèles lecteurs, vous connaissez déjà une partie des trésors conservés ici. Mais êtes-vous sûrs de tout connaître ? La présentation du fonds photographique de Jean Dieuzaide ou les opérations de numérisation du patrimoine vous réservent quelques surprises… Nous vous montrons le chemin, tous revêtus de l'accessoire à la mode. Alors, n'hésitez plus, venez ouvrir la malle au trésor !

Marchande de poissons posant avec son âne et sa charrette devant le marché Victor-Hugo, vers 1910. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi7199.

Ordralfabétix


juillet-août 2020

Si l'envie vous prend d'ajouter à vos salades d'été une petite touche forte en goût, haddocks, maquereaux et harengs sauront ravir vos palais. Rien de tel pour remettre un peu d'ordre dans sa vie qu'une bonne alimentation ! Nos ancêtres les Gaulois se montraient déjà très sensibles à la qualité des produits. Mais si... rappelez-vous… les irréductibles Gaulois en venaient à se battre pour dénoncer la vente du poisson pas frais. Heureusement qu'à Toulouse, le poisson ne venait pas de Lutèce !

D'où qu'il vienne, le poisson agrémente et embaume les étals de différents marchés. Tout d'abord pratiquée avec d'autres denrées sur l'antique marché situé sur l'ancienne place Esquirol, la vente de poissons déménage ensuite dans la halle construite en 1351, rue des Bancs-Majours (aujourd'hui rue Saint-Rome). Cette halle est remplacée, en 1552, par un bâtiment situé à proximité du Pont-Neuf, comme en témoigne la « descente de la halle aux poissons ». Malgré les protestations des riverains incommodés par l'odeur, ce bâtiment restera en fonction jusqu'au 19e siècle. Mais sa quasi-insalubrité aura raison de lui, et la halle sera désaffectée le 1er juin 1892, date de l'ouverture du marché Victor-Hugo.

Les marchés ne constituaient pas le seul lieu de vente du poisson. Sourire aux lèvres et le geste sûr, des marchandes de poisson se « baladaient » également dans les rues pour proposer leurs produits. Et que personne ne vienne dire que leur poisson n'était pas frais !

Boîte cartonnée comportant des cahiers de papier à cigarette (20e s). Mairie de Toulouse, Archives municipales, 1OBJ29 (photographie Stéphanie Renard).

Job in progress


juin 2020

Qu'évoque pour vous le terme [fumé] ? Indirectement, c'est la question posée aux auteurs de ce numéro, qui, à partir du thème du mois, ont carte blanche pour laisser libre court à leur imagination. Signe des temps ou déformation professionnelle, la cigarette a moins la cote, remplacée par les volutes des flammes.

Et pourtant, au cours des décennies précédant l'implantation de l'industrie aéronautique, la manufacture des tabacs a joué un rôle capital dans l'histoire de Toulouse en employant près de 2 000 personnes ! Il s'agissait de la plus grande entreprise de la ville et de la deuxième manufacture des tabacs de France. Les liens avec le tabac ne s'arrêtent pas à la seule manufacture : dès 1880, la société Job s'installe sur Toulouse et développe sa production, grâce notamment à l'usine qui démarre son activité en 1931 dans le quartier des Sept-Deniers. L'entreprise Job est mondialement connue pour son papier à rouler les cigarettes. Son fondateur, Jean Bardou, est même l'inventeur, en 1838, de ces petites pochettes contenant des feuilles de papier prédécoupées. Cahier de papier à cigarette (20e s). Mairie de Toulouse, Archives municipales, 1OBJ29 (détail - photographie Stéphanie Renard).Afin que la mémoire de cette société ne parte pas irrémédiablement en fumée, les Archives municipales ont récupéré les archives de ce symbole toulousain, après sa liquidation en 2001.

Si, à la lecture de cet article, la nostalgie vous envahit, prenez le premier train en partance, histoire de vous changer les idées. Sur le quai de la gare, aucune fumée ne vous piquera les yeux, ni celle des machines, ni celles des cigarettes. Partez sans risque, les incendies se font plus rares de nos jours, les pompiers et les archivistes y veillent. Et n'oubliez pas d'emporter quelques jeux pour vous occuper pendant le trajet... Une partie de « Smoking Pursuit », cela vous dirait ?

Photographie de la peinture d'E. Debat-Ponsan "Goudouli récitant ses poèmes devant Molière" (Capitole de Toulouse, salle du Conseil municipal) (vers 1930). Fonds des Toulousains de Toulouse – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 51Fi2298 (détail).

Arcanes, c'est le pied !


mai 2020

Vous l'attendiez tous, le voici dans vos mains !
Par son ton décalé, par sa diversité,
Ce numéro saura, comme à l'accoutumée,
Emplir de joie vos cœurs, embellir vos chemins.

Et, que vous aimiez les fleurs de poésie,
Que vous soyez friands de poète naissant,
Que les reliques des saints vous laissent tout tremblant,
Vous le dévorerez d'une âpre frénésie.

Et vous découvrirez, toujours avec mesure,
Le passé glorieux des faiseurs de chaussures,
Les mythiques histoires des vieux sarcophages,

Avant de vous détendre - ou plutôt votre esprit -
Avec des mots choisis, pour sonner sans mépris.
Et tout cela gaiement, sans aucun bavardage.

Claude François en concert à la Halle aux Grains, 1965. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi2487 (détail).

Huis clos avec Cloclo


avril 2020
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Paf ! À peine y a-t-il un parfum de printemps dans l'air que nous voilà assignés à résidence pour défendre le bien commun. Pour pallier cet enfermement volontaire, certains se jettent à fond dans le télétravail, quand d'autres se gavent de séries en continu. Ceux qui ont la chance d'avoir un jardin, même clos, ont vite fait de se croire au paradis. Les assoiffés de connaissances se jettent allègrement dans les puits de nos connaissances mis en réseau. Quant aux artistes d'hier et d'aujourd'hui, ils foisonnent d'idées pour évader nos esprits contraints, ne serait-ce que l'espace d'un instant. Un seul objectif : combler les fossés qui nous séparent aujourd'hui, pour mieux nous retrouver demain. Ces quelques images vous permettront par exemple, je l'espère, de revivre ce huis clos avec Cloclo, en concert à la Halle aux Grains de Toulouse en 1965.
 
 
 
 
 
Les capitouls de l'année 1630 siégeant au petit consistoire de l'hôtel de ville, actuellement rez-de-chaussée du Donjon. Huile sur parchemin par Jean Chalette. Mairie de Toulouse, Archives municipales, Livre VI des Annales manuscrites, BB 278, chronique 302.

Jouer son avenir à pile ou face


mars 2020

Quelle image vous faites-vous de la justice d'Ancien Régime ? Une justice impitoyable et cruelle, des individus jouant leur avenir à pile ou face, soumis à l'arbitraire des magistrats ? Si tel est le cas, vos références datent un peu... Vous auriez pu découvrir, dans l'exposition Justice commune qu'il n'en était rien ! Mais, ne vous inquiétez pas : nous vous offrirons une seconde chance de mettre vos connaissances à jour.
Le 2 avril, les plus grands spécialistes de la justice criminelle toulousaine d'Ancien Régime devaient se réunir à la bibliothèque d'Études méridionales, puis aux Archives municipales. L'occasion rêvée de découvrir les résultats des dernières recherches sur l'exercice quotidien de la justice rendue par les capitouls et sur l'espace du crime. Si vous restez bouche bée à une telle annonce, je vous invite à lire ou relire les meurtres décrits dans Meurtres à la carte. Depuis qu'ils ont défrayé la chronique dans la presse locale et nationale, en janvier dernier, six nouveaux meurtres y ont été ajoutés.
Bien entendu, l'actualité nous oblige à patienter un peu plus... Mais promis, on rempilera à la rentrée ! Pour tous les passionnés et curieux, cette journée, à laquelle vous serez tous cordialement invités, tombera pile-poil !
Eh oui, les piles de boîtes conservées aux Archives servent à construire, en béton armé, les fondations de la mémoire qui s'élèvent ensuite vers le ciel, telles les piles d'un pont...

Vue d'enfants faisant une bataille de boules de neige à Toulouse, au milieu des allées Paul Sabatier. 6 février 1954. Fonds Maurice Delgay - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 36Fi105.

Voyages dans le temps


février 2020

Qui n'a jamais rêvé de pouvoir voyager dans le temps ? Se glisser, telle une petite souris, dans un moment du passé pour connaître la vérité. Enfin, la vérité… Disons, plutôt, pour avoir un point de vue sur une situation en l'observant. Mais comprendrions-nous réellement ce qui se déroulerait sous nos yeux, sans baigner au quotidien dans le contexte de cette époque ? Nous pourrions être choqués de constater telle ou telle chose, culturellement ancrée dans les mœurs passées ou futures. Nous pourrions être étonnés de telle ou telle réaction, ignorants d'événements antérieurs au moment observé. Ne pas se méprendre sur ce que nous verrions demanderait un sérieux apprentissage en amont ! Les fictions basées sur des voyages temporels mettent souvent en scène des imbroglios à n'en plus finir, des répercussions fortes sur le présent – toute aussi relative que puisse être cette notion…
Finalement, les archivistes sont bien chanceux ! Ils se paient le luxe de voyager dans le temps sans remettre en péril l'ordre établi ! Eh oui, pour bien classer un fonds d'archives, la compréhension du contexte est indispensable. Mal le connaître entraînerait, là-aussi, des imbroglios à n'en plus finir. Certes, ceux-là n'auraient sans doute pas de fortes répercussions sur le présent... Pour autant, elles pourraient en avoir sur le futur : l'analyse d'éléments replacés dans un contexte erroné pourrait servir d'arguments à des théories complètement fausses. Quoique, en y réfléchissant bien, ce type d'interprétation n'aurait-il pas déjà eu lieu, produisant ainsi des répercussions sur le présent… Cela devient aussi compliqué que dans les fictions !
Pour rafraîchir vos méninges, je vous invite à plonger dans une scène, presque intemporelle, d'enfants jouant dans la neige. Si cette agitation n'évoque en vous aucun souvenir apaisant, préférez-lui le repos du poète Pierre Goudouli, imperturbable, même par ce froid de canard !

Vue générale montrant un étameur ambulant à l'ouvrage devant sa charrette, sous l'œil de quelques curieux et passants. [1918-1924]. Fonds Marius Bergé - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 85Fi1312.

Faire pot neuf


janvier 2020

Après les excès des fêtes de fin d'année, nous aspirons tous – enfin, presque tous – à revenir à des plats plus légers. Hum ! De bonnes soupes de légumes destinées à laver le gras ingurgité ces dernières semaines… Outre le choix des ingrédients, le secret d'une bonne soupe résiderait dans le pot utilisé. Ne dit-on pas « c'est dans les vieux pots qu'on fait la meilleure soupe » ? Les pots de nos arrière-grands-mères n'étaient pas en inox ou revêtus de téflon, mais en fer ou en cuivre. Pour empêcher l'oxydation du métal, l'étameur recouvrait les pots en cuivre d'un alliage d'étain et de plomb. Lorsque cette fine couche venait à s'user, le pot était rétamé, pour mettre le métal à nu. Il était alors prêt à être de nouveau étamé. Et oui, gare à vos vieilles casseroles ! Elles pourraient contenir du plomb ! Alors pourquoi dit-on que « c'est dans les vieux pots qu'on fait la meilleure soupe » ? L'expression ne vient pas de l'âge du pot utilisé, mais de la saveur apportée par le reste de soupe qui culottait le pot… Décidément, l'hygiène alimentaire a bien évolué !


Pour en revenir à notre étameur, il s'affaire en pleine rue. Mais pas n'importe quelle rue... Il s'est installé à l'angle des rues Pargaminières et Deville. Et quand on sait que la rue Pargaminières tire son nom des parcheminiers, on ne peut croire à une simple coïncidence… La photo de cet étameur ne pouvait échapper à ce numéro d'Arcanes ! Vous n'avez pas compris l'association d'idées ? Il est urgent que vous dévoriez ce numéro plein de pots et de peaux, mais sans poils.

« Justice Commune », une exposition des Archives municipales de Toulouse présentée du 3 décembre 2019 au 14 janvier 2020, dans le hall des pas perdus de l'université Toulouse 1 Capitole – entrée libre

Quand les capitouls donnent le LA


décembre 2019
Plus de deux siècles ont passé, et les capitouls n'ont pourtant pas fini de faire parler d'eux. Certes, ils ont été évincés de leur Capitole (la passation de pouvoir a toutefois été relativement paisible et courtoise), mais qu'importe, ils reviennent siéger en cette fin d'année et surtout rendre la justice, le temps d'une exposition.

Présentée dans le hall des pas perdus de l'université Toulouse-1 Capitole, l'exposition Justice commune replace le pouvoir et la pratique de la justice des magistrats municipaux dans le contexte général de la France, avant de s'intéresser plus particulièrement aux nombreux aides et suppôts que l'on trouve à leurs côtés, aux différents crimes constatés dans la ville et aux châtiments attendus. Une partie de l'exposition est plus particulièrement consacrée au déroulement-type d'une procédure criminelle, et s'appuie pour cela sur une belle affaire de meurtre datant de 1710, réglée et jugée en six jours chrono.

Hormis le Capitole, de quel plus bel écrin que la faculté de droit pouvaient rêver les capitouls pour venir insuffler aux étudiants juristes, aux futurs avocats ou magistrats, les lumières de leur justice bénévolente ?
Plan rapproché d'Henri Salvador lors d'une interview pour la sortie de son film "Et que ça saute !". 17 mars 1970. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi2547 (détail).

L’avoir sur le bout de la langue


novembre 2019

Quelle est la thématique de ce numéro d'Arcanes… ? Je l'ai sur le bout de la langue… Généralement, la photo aide… Henri Salvador, doryphore, forsythia, siamois, moisissures ? Ah, non ! Pas de moisissures aux Archives ! Ananas, nasale, saleté ? Décidément ! J'en ai marre ! Marabout, bout d'ficelle… Le voici le titre de ce numéro : « bout ». Et des bouts aux Archives, nous en conservons de différentes sortes : des bouts de ficelle, effectivement, mais aussi des bouts de papier, des p'tits bouts, des bouts de vie. À la lecture de ce numéro, vous ne serez pas au bout de vos surprises : vous vivrez une course haletante, vous découvrirez le fonds du photographe Marius Bergé, les secrets du conditionnement des plans, les lieux de la protection sociale au fil des siècles, la face cachée de la cathédrale Saint-Étienne, et le Bulletin municipal de la ville de Toulouse. Et si nos jeux de mots vous poussent à bout, vous n'aurez plus qu'à mettre les voiles en partant au bout du monde. Cependant, j'espère vivement que vous serez là le mois prochain, pour discuter le bout de gras.

Usine de produits explosifs, dite la Poudrerie Nationale, siège SNPE à Toulouse, 1 rue de la Loge. 1916-1918. Vue intérieure du bâtiment de l'usine où est effectué le triage du coton brut nécessaire à la fabrication de coton-poudre ; ouvrières en habit de travail blanc avec coiffe. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 16Fi22/63.

Plus on est de fous, plus on trie


octobre 2019
Dans la vie, il faut savoir faire du tri : du tri dans ses idées, du tri dans son assiette et, bien entendu, du tri dans ses papiers !
Si vous croulez sous les dossiers et que vous êtes dans le péTRIn, cherchez un archiviste, TRIé sur le volet, pour vous mettre le pied à l'éTRIer. Rapidement, vous oublierez que vous étiez une TRIple buse en classement et que votre organisation ne valait pas TRIpette.
Eh oui ! Faire du tri, c'est parfois coton ! Alors, il ne faut pas hésiter à s'y mettre à plusieurs. Et quand, comme ces ouvrières de la Poudrerie nationale, on trie du coton, cela devient impératif.
Pêcheurs. Canal latéral à la Garonne [années 1950]. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 41Fi357.

Est bien sot celui qui part pêcher sans son seau


septembre 2019
Après avoir pris beaucoup de hauteur dans les numéros précédents, il était nécessaire de revenir à des préoccupations plus terre-à-terre. Délaissons les sauts pour des plaisirs simples telle une journée passée au bord d'un lac, en famille, à regarder les enfants jouer avec les poissons fièrement péchés et collectionnés dans un seau. Bien entendu, pas question d'oublier le pique-nique ce jour-là, car attendez-vous à devoir négocier pour que leurs trophées finissent dans leurs assiettes ! Si, vraiment, vous n'en pouvez plus de démêler les lignes prises dans les fourrés (car, bien entendu, vous aurez pris la précaution d'éviter la proximité des arbres et arbustes, véritables pièges aimantés à fil à plomb…), vous pourrez toujours vous rabattre sur la découverte des sceaux et autres merveilles conservés aux Archives municipales de Toulouse. Les coulisses vous en seront ouvertes lors des journées du patrimoine. Et, bien que ce réservoir de la mémoire toulousaine occupe un ancien réservoir d'eau, aucun poisson (même d' argent) ne viendra perturber le plaisir de votre visite. Un bon moyen d'être un peu moins sot, tout en se divertissant !
LES ARCHIVES AU DONJON DU CAPITOLE, Vue de la rochelle et des voûtes. Ville de Toulouse, Archives municipales, 2Fi968.

Des chiffres indécents


juillet 2019
Non, je ne vous sortirai pas la doctrine d'un certain Yves Pérotin, auteur de la célèbre théorie des "trois âges des archives". "1, 2, 3", c'est trop simple, et ça me rappelle un tube hispanique de ma prime adolescence (1995 pour les curieux).
Je vous propose en revanche un exercice d'érudition statistique appliqué à nos fonds municipaux. Partons d'un chiffre : 15,2 kilomètres linéaires. C'était le volume conservé en début d'année dans notre réservoir de mémoire. Une mémoire ancienne, remontant au XIII e siècle.
Mais quelle proportion représentent les fonds d'Ancien Régime chez nous ? Ces derniers temps, nous l'avons constaté, les réponses données par certains visiteurs à cette nouvelle question étaient très surévaluées, allant de 2 à 3 km, soit 13 à 20 %. Or, les trésors hérités de l'Ancien Régime sont bien moins volumineux : 320 mètres tout au plus, soit 2 %. Petits mais costauds, car ils défrayent plus que jamais la chronique des Bas-Fonds.
Quant aux "archives modernes", qui courent de la Révolution à la fin de la III e République en 1940, elles ne représentent qu'un peu plus du double.
Même si ce petit kilomètre n'était pas encore entièrement collecté en 1945, les archives, à l'étroit dans le donjon de l'hôtel de ville, se sont installées cette année-là dans un local de la rue du Périgord, doublé en 1992 d'une annexe sur le site Léo-Lagrange. Quand, en 1996, les Archives s'installaient dans l'ancien réservoir d'eau de Bonnefoy, le volume des fonds atteignait 4349 mètres.
22 ans après, avec presque 11 nouveaux kilomètres privés, publics, audiovisuels, ou photographiques collectés, nous avons progressé de... 250 % !
Assez de chiffres incessants. La tête sature, comme le bâtiment actuel et les serveurs numériques. Quand on pense à ce qui nous attend avec l'intercommunalité devenue métropole, on se jure d'obtenir un espace supplémentaire de conservation... un projet tout récent !
Dessin représentant l'Éole de Clément Ader (1841-1925). Reproduction Francis Alexandre - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 15Fi2520.

Envol au-dessus d'un nid de Trois-Coucous


juin 2019
L'envol est une constante toulousaine. Déjà, à la fin du XVII e siècle, un imposant faîtage nommé « colombe » surplombait Toulouse depuis la tour d'une métairie sise sur la butte du Calvinet, occupée aujourd'hui par les quartiers de Guilheméry et de la Côte-Pavée. Par prémonition, l'accès nommé « chemin de la Colombette » devint tout d'un coup, deux cents ans plus tard, celui de la Gloire, puis l'avenue du même nom. Il faut dire que Toulouse voyait, depuis quelques décennies, l'essor d'un drôle d'oiseau venu de son muretain natal : Clément Ader. Loin des colombages du centre-ville et de la très terre-à-terre Hirondelle des frères Amouroux, le génial inventeur allait marquer son époque.
Depuis l'actuelle rue de la Colombette, dernier vestige du chemin d'antan, 3,5 km nous conduisent (à vol d'oiseau, bien entendu) au quartier des Trois-Coucuts, animaux à plume auxquels une confusion de sens et d'orthographe donne fortuitement des cornes – ce qui a peut-être attiré les Izards, installés tout près. L'urbanisation complète de la zone a conduit les bâtisseurs à migrer immédiatement au nord pour investir le quartier de Borderouge, où la cigogne de la modernisation a récemment livré à l'administration municipale de nouveaux locaux dont il va être question plus bas dans ce numéro. Et dire qu'il y a 26 ans déjà, une colombe annonçait aux Toulousains le chantier de leur première ligne de métro !
Quartier Saint-Étienne, 1er novembre 1995. Vue des ponts Neuf et Saint-Pierre depuis le rond-point de retour de l'avenue de la Garonnette, avant l'arche du pont du quai de Tounis, qui s'ouvre sur la berge en contrebas du quai de Tounis. Ville de Toulouse, Archives municipales, 1Fi7172.

Trente-six ponts ponts ponts


mai 2019
Voilà un titre digne d'Agatha Christie. L'intrigue pourrait se passer à Toulouse, il y a 12 000 ans, sur les bords de l'Hers. Un Magdalénien demande des comptes sur la disparition des mammouths à un Aurignacien passant par là. Ce dernier, écologiste accablé par la nostalgie, et plus encore par ses 17 000 ans d'âge, succombe aussitôt à cet ultime affront. Craignant pour sa défense (et pas de mammouth), le Magdalénien, l'Hers de rien, cache le corps du malheureux ancêtre dans le proche marécage, sous un saule. Ce dernier, ému jusqu'aux larmes, fait une tête de six pieds de long qui s'ajoute à un tronc déjà centenaire. Nul ne sut pourquoi ce saule devint tout d'un coup le plus allongé de tous les saules du pays tolosan.
Complice, la nature cache encore mieux le crime : tel Hercule détournant l'Alphée, elle décale peu à peu le cours l'Hers à plus de 2 km à l'est. Au milieu du marécage, le flux pérenne du pleureur forme un ruisseau que la postérité occitane appellera Sauzat. Nous sommes déjà loin des Madgaléniens, même si le saule, vous l'aviez deviné, a toujours quelque chose d'une Madeleine.
Puis, au XVIe siècle, le Sauzat est détourné par les Toulousains vers le fossé du Château narbonnais (château dont on peut encore voir les vestiges sous l'actuel palais de justice). Pour accéder aux propriétés riveraines, des ponceaux sont construits, qui enjambent ledit Sauzat. Sont-ils innombrables ? Quand on ne sait pas compter, il n'y a pas trente-six solutions : on invente. Alors, on a dit "les trente-six ponts". On en a même fait une rue, qui n'a pas échappé à l' érudition de Pierre Salies à qui je dois ce dernier paragraphe.
Et, pour faire le pont entre l'histoire et cette petite légende finalement plus ovidienne qu'autre chose, on ajoutera que l'emplacement du saule allongé a été traduit en occitan par Saouzelong, donnant son nom au quartier construit sur les antiques marécages de l'ancien lit de l'Hers. On ne s'étonnera donc pas d'apprendre que le Sauzat ne signifie rien d'autre que le ruisseau "bordé de saules". Et de trouver un jour, dans les jardins du couvent de la Présentation, un squelette d'Aurignacien ?
Le Mirail, quartier de la Reynerie urbanisé autour de son lac, et survol des Pradettes. 1986. Ville de Toulouse, Archives municipales, 15Fi4876.

Toulouse, destin démen-ciel


avril 2019
Si, dans ce numéro, nous prenons encore de la hauteur, ce n'est pas pour disputer à la légèreté de ces plumes d'oies auxquelles nos fonds anciens doivent tant (non, non), mais pour regarder Toulouse face à son destin (si, si).
De 230 000 habitants en 1941, la ville est passée à plus du double aujourd'hui. Si le différen-ciel démographique donne le vertige, les images aériennes de nos fonds ne le donnent pas moins. Et c'est encore plus vrai si l'on considère le territoire de la cité élargi aux communes alentour, aujourd'hui et il y a 60 ans. (Pour remonter jusqu'au cadastre toulousain de 1680, rendez-vous sur UrbanHist+). Toulouse à la conquête de l'espace : rural, aérien, spatial...
Toulouse s'est donc élancée : inaccessible étoile, ou "porte du ciel" ? Si l'on se fie à des chiffres aussi offi-ciels qu'exponen-ciels, en terme d'aménagement, une belle équation se pose à la cité de... Pierre de Fermat, le ciel en soit loué !
P. Baudis présente son fils Dominique successeur. Place Saint-Georges. 12 octobre 1982. Vue de Pierre Baudis qui présente son fils Dominique Baudis à une passante. Ville de Toulouse, Archives municipales, 53Fi3607.

Un air de jouvence


mars 2019
Pour en finir avec le gras du dernier Arcanes, entrons dans le jeûne. Car oui, c'est la thématique de ce numéro. Soyons ascètes, ou plus encore si vous voulez. Des ascètes en début de travail spirituel, encore mal dégrossis de la bombance des semaines passées. Des ascètes garnis. Voilà de quoi contourner l'obstacle de ce mot qui ne m'est pas familier.
Jeûne… Ce n'est pas ce que vous attendiez ? Ou alors, jeûne ai pas compris la thématique ? Lisez donc les billets qui suivent, pleins de confiance juvénile, comme cette image. Comme je suis jeune et en pleine croissance, pendant que vous dégusterez ce qui suit, je reste dans la thématique et vais me resservir une assiette.
"Vous cherchez un beau foie, monsieur ? Non mademoiselle, je cherche un joli petit cœur". Enfants autour d'un étal avec des oies grasses et des foies gras. Au fond : le marché des Carmes. Ville de Toulouse, Archives municipales, 9Fi7121.

Le gras, c'est la vie


février 2019
Du côté des halles, un vendeur de camelote n'hésitera pas à vous le dire.
Dans ce numéro, les archivistes vous le confirmeront aisément car, essentiel à notre mémoire, le cerveau humain contient 10 % de lipides. Et les Archives municipales de Toulouse (dont les riches fonds, qui ne sont pourtant pas de sauce, comprennent aussi ceux de Toulouse Métropole depuis le 1er janvier), ne manquent pas de gras, à telle enseigne que l'on ne sera pas fâché de passer du coq d'Inde du mois dernier, au Coq d'Or des années 1920. Joli lieu où galants et galantes pouvaient bourgeoisement discuter le bout de (foie) gras, celui-là même où, haruspice des temps modernes, un joli cœur toulousain sut trouver l'amour. L'histoire ne dit pas s'il s'agissait déjà d'un homme alpha en quête d'une femme oméga(-3).
Rue du Coq-d'Inde. Vue perspective ascendante de la rue du Coq-d'Inde depuis la rue des Paradoux. Cliché réalisé avant les travaux de voirie. Marcel et Henriette Patez - Ville de Toulouse, Archives municipales, 1Fi190.

Indes


janvier 2019
Comme souvent, un simple mot réveille en moi le souvenir d'un autre mot, voire d'une chanson. Et ce mot « comptoir » fait donc résonner une chansonnette de Guy Béart sur les comptoirs de l'Inde. Alors, à la faveur de ce froid de canard, et après avoir évoqué Johnny et Patrick le mois dernier, allons nous réchauffer aux Indes, que Guy a rendues si galantes, n'en déplaise à saint François Xavier qui l'y a précédé, ou à George (non pas Brassens, mais V, qui en fut l'empereur).
De retour des Indes, et inspirés par le susdit canard, passons au coq : le coq d'Inde, bien sûr. Comme le narre si bien Pierre Salies dans son Dictionnaire des rues de Toulouse (tomes 1 et 2), cet animal, désormais nommé dindon, a illustré une enseigne dont le nom, apparu en 1736, ajoute une touche pittoresque à l' odonymie toulousaine. L'histoire ne dit pas si l'on y dégustait du coq au vin, fût-ce ce vin « retour des Indes » remis au goût du jour par des œnologues fanatiques d'archéologie expérimentale. Du vin de derrière les fagots... ou plutôt de derrière les comptoirs.
Gala de la Légion à Toulouse Théâtre du Capitole, place du Capitole. 2 juin 1965. Vue de Johnny Hallyday qui salue le général Koenig. Ville de Toulouse, Archives municipales, 53Fi5090.

Caser la voix


décembre 2018

Oui, il fallait bien caser ce mot et ses semblables. Aux Archives, on aime les défis. Et on archive des voix, ah que oui. (Car non, nous n'avons pas encore d'image de Patrick.)

Des voix médiatiques, voi(re) politiques. Par une curieuse synesthésie, à redécouvrir cette image, on entend déjà retentir, optimiste, un célèbre "bonsoiiiir" ouvrant la voie d'un ministère. Voix mythique et fugace. Oubliée des uns, archivée par d'autres, pour réapparaître en ce jour. Un vrai mythe errant.

De claires voix, qui émanent d'aubes blanches... bien loin d'une actualité à la couleur plus chaude, dont émane un son bien plus brûlant, au retentissement bien plus neuf : celui de la voix née.
Restons optimistes en espérant que, battant le pavé sans le lancer, foulant l'arène mais pas le roi, imitant les sirènes sans les déclencher, évitant l'estocade pour elle comme pour autrui, finalement la voix rie.

Stand des laboratoires du Pain Moderne, produits de régime, lors de l'Exposition Nationale de l'Enfance, Toulouse, juin-juillet 1932. Cliché J. Saludas. Ville de Toulouse, Archives municipales, 1Fi5555.

En peine de pain ?


octobre 2018
Comme les Archives sont notre pain quotidien, on ne pouvait pas déroger à ce mot, et même à cette thématique qui a fait la fortune de notre histoire : sous l'Ancien Régime, qui était visiblement amincissant, on a fini par manquer de pain, et c'est ainsi que le bon peuple versaillais alla chercher le boulanger, la boulangère et le petit mitron. Finalement, ce fut un consul qui, devenu empereur, proposa à son peuple un régime adéquat : en déclarant « Quand j'aurais appris qu'une nation peut vivre sans pain, alors je croirai que les Français peuvent vivre sans gloire », notre Napoléon, qui fut un sacré galopin, allait apporter la gloire au prix de milliers de vies. L'histoire ne le dit pas, mais son île d'origine était friande d'une spécialité nommée Panu di i Morti. Ses copains grognards apprécieront.
Mais revenons à Toulouse : qui se souvient que nous autres bons vivants avons osé pervertir ce qui fut la garantie de notre subsistance ? Eh bien, sachez que si une industrie a été oubliée par les Toulousains, c'est peut-être à juste titre celle-ci.
Nos pauvres enfants du nouveau régime n'avaient plus qu'à user leurs escarpins pour quérir une nourriture plus saine… Pauvres petits poupins !
Gloire à nos troupes victorieuses [guerre 1914-1918]. 9 août 1919. Célébrations du retour du XVIIe corps d'armée à Toulouse : le général Germain Passaga, suivi de son état-major, arrive à cheval boulevard de Bonrepos - après avoir remonté la rue de Bayard - pour aller saluer les drapeaux du XVIIe corps d'armée ayant pris place devant la gare Matabiau. Marius Bergé - Ville de Toulouse, Archives municipales, 85Fi1174.

Do le do il a bon do...


septembre 2018

Non, je ne vais pas vous chanter la chanson de La mélodie du bonheur et, non, je ne vais pas me coucher non plus. Mais c'est un fait : je quitte Toulouse et les Archives municipales après des « années de bons et loyaux services ».

Arcanes est entre les mains d'une bonne équipe, pleine d'idées et de fantaisie, qui met en musique chaque mois de petites histoires, teintées d'humour, parfois d'ailleurs à scruter au deuxième, voire au troisième degré !

Après avoir tenté de donner le La à une escouade de joyeux drilles, je tourne le dos au passé et vais voguer vers de nouvelles aventures archivistiques et personnelles.

Bonne chance à tous et je « vous souhaite tout le bonheur du monde, et que quelqu'un vous tende la main, que votre chemin évite les bombes, qu'il mène vers de calmes jardins »...

Au revoir

Vue aérienne oblique de la place du Capitole et des rues aux alentours en 1957. Roger Henrard - Ville de Toulouse, Archives municipales, 32Fi14.

Dans la place


juillet - août 2018
 

Quand la chaleur vous assaille, il est essentiel de ne pas perdre la tête. Ce ne sont pas les rédacteurs d'Arcanes qui vous diront le contraire. Les couvre-chefs peuvent vous protéger des rayons du soleil mais ne garantiront pas l'intégrité de votre caboche. Il faut garder le cap.
Et si vous alliez au Capitole pour profiter des derniers jours du festival Science in the city, (re)découvrir UrbanHist, ainsi que les autres activités et jeux scientifiques proposés dans le village, qui se tient sur la place jusqu'au dimanche 15 juillet ?
Profitons-en pour se balader dans le passé de ce site et observer l'évolution d'une rue devenue la place la plus emblématique de la ville au cours du temps.

1. Toulouse. Ruines d'un vieux pont sur la Garonne. Pilier du vieux pont de la Daurade, au milieu de la Garonne. Août 1869. Au premier plan, le pilier démoli en février-juin 1950 ; au second, la Garonne et le quai de la Daurade ; au-dessus, la façade de l'église Notre-Dame de la Daurade avant sa réfection dans les années 1920. Ville de Toulouse, Archives municipales, 1Fi861. Domaine public.

Pile et face


juin 2018

Arcanes de juin ne tente pas le sort mais conte sa chance. Il n'est pas question de vous inciter à jouer aux jeux de hasard - même s'ils ont pu favoriser certaines personnes dans le passé et que le loto bénéficiera bientôt au patrimoine. Comme d'habitude nous allons vous offrir des petits billets, en espérant qu'ils vous distraient quelques instants.

Cadeau : pour les journées nationales de l'archéologie qui débutent aujourd'hui, les Archives de Toulouse ont décidé de verser sur Wikimedia Commons environ 200 images élevées dans le domaine public. Elles seront utilisées pour enrichir des notices de l'encyclopédie en ligne Wikipédia, lors de l'atelier au musée Saint-Raymond du 16 juin, et par tous les amateurs de Toulouse et de son passé.

Un exemple de ces fameux documents : la photo montrant la pile de l'ancien pont de la Daurade, vestige démoli en février-juin 1950, et la façade de l'église Notre-Dame de la Daurade avant sa réfection dans les années 1920. Pile et face !
Pour découvrir les 206 documents sélectionnés, consulter les notices dans notre base de données en ligne, et elles seront bientôt dans Wikimedia Commons.

Pour en savoir plus sur les JNA à Toulouse : télécharger le programme.

PS : Saviez-vous qu'une nouvelle restauration de l'église de la Daurade est engagée et qu'un appel à mécénat est lancé pour redonner vie à ses cloches ?

Aucamville (Haute-Garonne), le ruche du Mariel. Décembre 1911. Henri Giscard et un apiculteur au milieu des ruches. Famille Giscard - Ville de Toulouse, Archives municipales, 46Fi1443 (détail).

Miel


mai 2016
Un peu de douceur printanière n'est pas de trop. Après l'amer, le sucré pour arrondir sans édulcorer. Avec les rédacteurs d'Arcanes, point de fadeur mais de la délicatesse… quoi que. Une des contributrices s'inspire d'une chanson de Prince pour vous parler de la fleur emblème de la ville, une autre vous donne la recette d'un poison pour les rats, une troisième préfère les biscottes, un quatrième évoque l'hypoglycémie archéologique, une cinquième vous raconte le pays de Candie et, pour le dernier, je vous laisse découvrir en quoi consiste le sucre de Mars !
Moi, j'aime le miel. Une substance élaborée avec habileté par les abeilles et qui nous offre toutes ses vertus gustatives et thérapeutiques reconnues dès l'Antiquité. Antibactérien, cicatrisant, source d'énergie mais apaisant également, le miel est pour certains un don du ciel. Il faut juste protéger les abeilles pour qu'elles ne soient pas victimes du syndrome d'effondrement.
Foire de Toulouse 1932 au cours Dillon : réception extérieure. Joseph Saludas. Ville de Toulouse, Archives de Toulouse, 1Fi5543 (détail).

Jusqu'à la lie


avril 2018

Arcanes d'avril tente de garder le cap en vous offrant de manière très détournée de prendre la vague, entre ciel et a(mer), avec un peu d'amertume, mais sans vous faire payer une amende trop amère. Qu'importe le flacon… il faut parfois boire la coupe jusqu'à la lie. En 1932, l'assemblée composée uniquement d'hommes – ce qui ne semble pas très paritaire à notre époque – s'apprête à lever son verre pour célébrer la foire de Toulouse. On ne peut pas lire une joie intense sur leurs visages, mais impressionnés par le photographe planté en face d'eux, ils intériorisent peut-être leur bonheur de partager ce moment de convivialité.
Installée au cours Dillon en 1928, la foire prit ensuite place sur les allées Jules-Guesde, les allées Frédéric-Mistral, puis au parc municipal des sports sur l'île du Ramier. Elle est aujourd'hui organisée au Parc des expositions. Vous avez d'ailleurs encore peu de temps cette année pour aller en profiter !

Livre X des Annales manuscrites, chronique 380, les capitouls de l'année 1708-1709, par Antoine Rivalz, huile sur parchemin. Ville de Toulouse, Archives municipales, BB 282, p. 421i (détail).

(Re)garnir ce qui n'est plus


mars 2018

À 54 ans révolu, je me dis qu'il est temps de s'intéresser à l'état de mon propre capillaire et, par un subtil assemblage de miroirs, de vérifier l'avancée de cette calvitie qui guette (un selfie avec le smartphone fait aussi bien l'affaire).
Eussé-je vécu sous l'Ancien Régime, le problème aurait été résolu en deux tours de mains : j'aurais pu opter pour une habile tonsure à la manière d'un ecclésiastique, mais, n'étant point oint du Seigneur, il m'aurait plutôt fallu me garantir contre ces outrages du temps par le port de la perruque.
Hé oui, regardez-donc : bien malin qui saurait affirmer si nos capitouls avaient le sommet de leur crâne correctement garni, ou bien si ces postiches exubérantes cachent autant de crânes déplumés... (voir illustration ci-contre).

Le seul problème est qu'en cas de grand vent ou d'une sérieuse secousse (carriole qui roule sur les mauvais pavés, chaise à bras dont l'un des porteurs trébuche, rixe au cours de laquelle notre agresseur nous serre brusquement au collet), bref, tombe la perruque...

Là, le crâne apparaît dans toute sa nudité d'œuf, de caillou poli. Reste à ramasser à la hâte le postiche et de le remettre tant bien que mal sur la tête. Mais les voies de l'Ancien Régime sont décidément bien semées d'embûches... Figurez-vous que l'agresseur (voire ce vent malicieux) emporte la perruque comme un trophée, comme un scalp !!!!
Là, il n'y a d'autre alternative que de se couvrir la tête d'un mouchoir et de courir jusqu'à la boutique du perruquier la plus proche ; telle mésaventure arrivée à Joseph-Marie de Charlary est symptomatique du sentiment des malheureux dégarnis à l'improviste.

D'ailleurs, que vous partagiez mes affres capillaires ou pas, on vous conseille d'aller (re)lire les Bas-Fonds de juin 2016, exclusivement consacrés aux perruques masculines toulousaines.

Pour la France versez votre or. 1915. Guerre 1914-1918. Affiche de propagande en faveur de l'emprunt dit "de la défense nationale" reproduisant le dessin d'un coq gravé sur une pièce d'or terrassant un soldat allemand. Devambez Imp. ; Société des Amis des Artistes. Abel Faivre - Ville de Toulouse, Archives municipales, 11Fi17.

Or


février 2018

Pas de carton jaune pour les rédacteurs des articles d'Arcanes ! Même s'ils dévoilent des signes de vieillesse au cœur des archives ou qu'ils évoquent des tentations de simulacre ou de simili, et que, de temps à autre, ils nous en font voir de toutes les couleurs. Ils nous invitent à ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier et, parfois, à sucer des cachous, tout en nous méfiant des cures de « rajaunissement ».

Les Archives recèlent des richesses inestimables. Nul doute que vous en soyez tous convaincus de longue date, chers lecteurs d'Arcanes. Vous n'appartenez pas à la cohorte de ces béotiens qui ne voient que poussière, vieux papiers et documents inutiles, là où vos yeux admirent les traces de notre histoire, lointaine et récente à la fois, où votre esprit s'émerveille des lumières qu'elles offrent pour mieux comprendre notre monde actuel.

Oui les archives sont essentielles pour tous. Après une sélection soigneuse et raisonnée, les données et documents sont transmis au plus grand nombre pour, à tout moment, offrir la preuve dont l'administration et les usagers peuvent avoir besoin, pour être l'outil traditionnel des historiens et de tous ceux qui s'intéressent à leur histoire, qui ont besoin de reconstituer le passé pour donner des clés de compréhension du présent.

Versez votre or ! Versez vos archives !

Vue d'intérieur de l'agence de Blagnac de la Banque Régionale d'Escompte et de Crédit, les employés expliquant aux gendarmes le déroulement du braquage, 8 octobre 1971. Photographie André Cros - Ville de Toulouse, Archives municipales, 53Fi1107.

Des valises


janvier 2018
A parler de valises entre archivistes on comprend vite qu'en fait on ne se comprend pas du tout !
Pour les uns, les valises évoquent le voyage, le camping, le train, l'évasion ; d'autres y voient une mallette du parfait cuisinier (si, si !), et dans les fonds d'archives anciennes on imagine plutôt…
Non, on n'imagine pas, on voit !
On voit des poches de distraits délestées, des brigands de grand chemin l'arme au poing, des vols domestiques, des effractions dans les maisons vides que l'on s'empresse de vider encore plus, des églises que l'on pille audacieusement et des boutiques que l'on dévalise à la nuit tombée.
Il faut bien admettre qu'à classer le fonds des procédures criminelles des capitouls, on finit inévitablement par voir le mal partout et que, peu à peu, le crime vous habite.
Tenez, rien qu'en 1702 ( FF746) : le dépouillement d'un touriste dans une auberge, le braquage raté chez un directeur des impositions, quatre vols domestiques. Attendez, le meilleur reste à venir : il y a encore un vol de chien (« un très beau chien canard à poil blanc »), un vol de cochons, un vol d'oignons dans un jardin, un vol de portes et de fenêtres et enfin un autre de tapisseries !
Personnellement, on a un petit faible pour cette affaire remontant à 1704 où le marchand Jean Glanouze se fait dévaliser et subtiliser sa « valise forte » qui, à ses dires, contenait tout de même la somme de 1 000 livres (FF748/1, procédure #012).
4. Théâtre du Capitole. Vue prise durant l'incendie. 4e galerie et combles. 10 août 1917. Clovis Lassale - Ville de Toulouse, Archives municipales, 9Fi3763. Domaine public.

Faire feu de tout bois


décembre 2017

Encore une fois, quelle imagination débordante ! Quand les contributeurs d'Arcanes s'emparent d'un sujet, cela donne lieu à un véritable feu d'artifices de révélations sur nos sources archivistiques et de découverte du patrimoine toulousain.

 

Nous vous invitons à déguster cette décoction jusqu'à la lie. Bois et qu'importe le flacon… car Toulouse dévoile son histoire à travers ces petits libelles. Du pont de bois à l'orée du bois, croix de bois, croix de fer, on vous raconte une histoire de tabouret, quelques pans d'histoire et les déboires de Jeanneton. Que cette dernière flambée de l'année vous apporte un peu de chaleur.

Et parce que « le feu ça brule » dixit les Top Boys, quelques photographies d'incendies au Capitole, ou à proximité, à visionner en hommage aux soldats du feu que sont les pompiers toulousains !

Scène de bagarre lors de la corrida du 2 juillet 1961 aux Arènes du Soleil d'Or sises au quartier des Arènes, photographie noir et blanc. André Cros - Ville de Toulouse, Archives municipales, 53Fi359.

Des quilles et des cannes


novembre 2017

Quand on joue aux quilles, on tend à dire qu'on décanille et non qu'on déquille (ce dernier verbe étant pourtant tout à fait juste). Serait-ce parce qu'il est plus amusant de viser les gambettes, les « cannes » d'un adversaire ou d'un passant que les quilles du jeu ?

Mais qu'advient-il lorsque l'adversaire, celui que vous avez si bien décanillé, se saisit de sa canne pour vous corriger. Dira-t-on qu'il vous décanille ? Ou tout simplement qu'il vous rosse ? Bref, comme Nougaro l'a bien chanté, cela se termine souvent en castagne.
C'est en tout cas ce que de nombreuses plaintes portées devant la justice criminelle des capitouls laissent imaginer.

Mais nos aînés n'avaient certainement pas le monopole de la castagne, témoin cette belle empoignade entre un torero et un spontaneo. Le premier n'avait visiblement pas de canne pour se défendre, mais il aurait pu faire quelques passes avec sa muleta, planter une ou deux banderilles dans l'arrière-train de son agresseur, ou mieux encore : s'attribuer les oreilles du furieux au moyen de son estoque !
Gageons que le taureau aura profité de cet instant de répit pour aller se dégourdir les cannes.

[Usine hydroélectrique du Ramier]. Île du Ramier. 1931-1938. Vue des tableaux haute tension de l'usine hydroélectrique sur l'île du Ramier. Louis Albinet – Ville de Toulouse, Archives municipales, 1Fi10231. Domaine public.

La tension ou l'attention ?


octobre 2017

Faut-il s'alarmer ? Un vent de discorde souffle-t-il sur les Archives ? Ou alors l'équipe est-elle victime d'une chute de tension ? Un danger imminent met-il en péril les archives ?

L'équipe a décidé de faire des étincelles en partageant avec les lecteurs d'Arcanes une thématique soulevant la curiosité, parfois morbide, incitant à la vigilance, mais en veillant, avec soin, à apporter une note de délicatesse et même de sensibilité...

Alors tension ou attention(s), à vous de choisir la déclinaison qui vous siéra le plus !

 

Comme a dit l'abbé Pierre, "Un sourire coûte moins cher que l'électricité, mais donne autant de lumière." Que cela ne nous empêche pas de nous pencher avec attention sur les miracles technologiques grâce à une petite visite guidée des installations techniques de la centrale hydroélectrique du Ramier mises en lumière dans les années 1930...

Vue aérienne de la Garonne vers l'hôpital de la Grave, le pont Saint-Pierre, le Bazacle, prise par un drone. 21 juillet 2017. VIP Studio 360° ; Drone Sud Toulouse - Ville de Toulouse, Archives municipales. Licence CC 4.0 BY SA.

Le bon plan ? UrbanHist !


septembre 2017

Visa sur le patrimoine toulousain à l'aide d'UrbanHist, tout neuf et concocté avec enthousiasme par l'équipe.

Cliquez sans attendre sur www.urban-hist.toulouse.fr pour découvrir à la fois ce nouvel outil et le patrimoine de la ville rose. Sur votre ordinateur, tablette ou smartphone, partez à l'aventure à travers les rubriques à découvrir, les circuits, les thémas, la ville invisible, les parcours pour les scolaires…

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UrbanHist propose aux internautes de découvrir et visiter le patrimoine remarquable de Toulouse (UrbanHist) et, s'ils le souhaitent, d'effectuer des recherches approfondies sur le patrimoine et l'histoire de Toulouse (UrbanHist+).

Et comme le patrimoine c'est l'affaire de tous, n'hésitez pas à partager vos cartes avec l'icône prévue à cet effet. Déroulez votre parcours dans Toulouse au gré de vos envies et surtout n'oubliez pas de nous donner des nouvelles !

Pour en savoir plus...

Pont Saint-Pierre sur la Garonne. 24 mai 1929. Mise en place d'une poutre ; ouvriers au travail, éclairage public. Vue prise depuis le tablier du pont en direction de l'église Saint-Joseph-de-La-Grave. Louis Albinet. Négatif NB, verre, 13 x 18 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 6Fi18. Domaine public.

Archives ouvertes ?


juillet-août 2017

La ville de Toulouse vient de réaffirmer sa démarche d'ouverture des données publiques et des œuvres gérées par les établissements patrimoniaux. Le 23 juin dernier, le conseil municipal a, en effet, voté à l'unanimité les règles de réutilisation des informations publiques, œuvres produites et reçues par les Archives, la Bibliothèque, les Musées Saint-Raymond, des Augustins, Paul-Dupuy et Georges-Labit et le MATOU, musée de l'affiche de Toulouse.

Grâce aux licences libres choisies (ODbL et Creative commons 4.0 BY SA), la plupart des données et des œuvres peuvent être partagées librement sous réserve de partage à l'identique et donc de les garder ouvertes.
Toute personne souhaitant les publier, les modifier et les partager est libre de le faire sous réserve de respecter les règles indiquées et d'apposer la mention de l'auteur et de l'origine (Auteur – Ville de Toulouse, Nom de l'établissement patrimonial, cote ou référence).

Attention, la réutilisation d'informations publiques comportant des données à caractère personnel est subordonnée au respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
En outre, les œuvres sous droits n'entrent pas dans le champ du libre partage.

Les œuvres entrées dans le domaine public sont totalement ouvertes, sous réserve d'indiquer la mention déjà citée.

Profitez de la fermeture annuelle de la salle de lecture, jusqu'au 31 juillet, pour consulter la base de données en ligne et découvrir la richesse de nos fonds !

Vue aérienne du cours de la Garonne en aval du pont Saint-Pierre, 22 octobre 1973. Direction de la communication - Ville de Toulouse, Archives municipales, 15Fi2292/1.

Dans le rétroviseur


juin 2017

Je me souviens… Il est doux, parfois, de contempler les fragments du passé dont la mémoire garde la trace. Bribes d'une histoire auxquelles les archives et les découvertes archéologiques donnent un certain relief.
Pierre s'interroge sur la mode du selfie en faisant un bond dans l'histoire de la photographie jusqu'à son invention par Daguerre au milieu du 19e siècle. Audrey s'intéresse au journal Le Miroir, hebdomadaire photographique du début du 20e siècle et Soazig se penche sur une question d'esthétique essentielle : le "ravalement de façade", urbain bien sûr. Marc se pose d'antiques réflexions en franchissant allègrement le gué. Emmanuelle rit de se voir si belle en ce miroir alors que Géraud se demande qui est la plus belle !
Grâce à ces petits miroirs de courtoisie, Toulouse se dévoile un peu pour nous.

 

Les images suivantes se font, quant à elles, l'écho d'un passé plus tumultueux, témoignant de la puissance redoutable de la Garonne. Elles présentent un mois de juin catastrophique qui, aujourd'hui encore, est la référence en matière de politique de prévention du risque inondation. En effet, le 23 juin 1875 s'est produite la grande crue qui a marqué les esprits à Toulouse.
Grâce à Joseph Provost et son fils, photographes officiels des inondations, de nombreux clichés mettent en images le récit de cet événément mémorable.

Commissariat général à la famille. Journées des mères. Dimanche 30 mai 1943. Edité par l'office de propagande générale, 37 rue de Lille, Paris (4-1943). Pierre Grach dit PHILI - Ville de Toulouse, Archives municipales, 82Fi n.c. (détail).

Bonne fête maman !


mai 2017
 

Je ne vous raconterai pas l'histoire de la fête des mères. Je vous éviterai également les citations qui célèbrent nos chères mamans. Je ne vous offrirai pas non plus de poèmes de mon cru.
Je vous invite à une lecture de billets éclectiques émis par les rédacteurs d'Arcanes, qui comme d'habitude, s'en sont donné à cœur joie pour vous régaler de leurs chroniques toulousaines. On y parle du gavage des oies (si si !), d'enfant abandonné et de filles-mères, de proposition d'offrande, de médaille d'honneur, d'associations féministes...
Et en prime, je vous offre, en avant première, une petite sélection d'affiches qui viennent tout juste d'être récupérées chez un particulier, collectionneur acharné. Elles ne sont pas encore saisies dans notre base de données et vous pouvez savourer ces dessins de 1943 à 1951 avant tout le monde. C'est cadeau !

Muséum d'histoire naturelle. Grande salle de zoologie. Avril 1933. Zèbre attaqué par des Léopards. Groupe de M. Lacomme nouvellement installé. Augustin Pujol – Ville de Toulouse, Archives municipales, 1Fi280.

Sur le fil


avril 2017

Pourquoi une lettre d'information sur le fil ? Et pourquoi pas ! Peut-être parce qu'en avril… ou alors parce que nous sommes tous un peu sur le fil du rasoir... Tentons de ne pas vous raser et de vous apporter une petite bouffée d'air frais en partageant avec vous nos pépites !

Mais y a-t-il quelqu'un au bout du fil ?

Je vais essayer de le renouer sans m'enterrer dans les arcanes des idées farfelues des contributeurs. Je me déplace sur un fil et dans tous les cas cette lettre me donne du fil à retordre. Ah… quand les hommes filaient la quenouille. Quel rapport ? Faites une pause et lisez nos petites chroniques ou billets d'histoire toulousaine avant de reprendre le cours de votre vie.

 

 

 

Commencez par parcourir une petite sélection d'images d'avril à Toulouse remontant le temps.

Un florilège sans queue ni tête issu de notre base de données en ligne mêlant images récentes et anciennes, célébration et catastrophe, et qui permet de découvrir des images de Toulouse méconnues.

 

Original du mémoire remis par Malvaisin aux capitouls le 17 octobre 1703. La justice ordonnera ensuite qu'il soit biffé, bâtonné et lacéré. Ville de Toulouse, Archives municipales, FF747 (en cours de classement), procédure # 088, du 19 octobre 1703.

Biffé, bâtonné, lacéré : bref, censuré


mars 2017

En 1703, Jean-Jacques Malvaisin n'est encore qu'un petit greffier de l'hôtel de ville.
Fougue de la jeunesse ? Idéalisme exalté ? Mauvais calcul ? Il va s'attaquer à François Dandrieu, un ancien capitoul ayant toujours un pied à l'hôtel de ville ; et quel pied, puisqu'il est assesseur des capitouls, c'est à dire qu'il les assiste dans l'exercice de la justice. Inutile de vous dire qu'il a le bras long.
Le 19 octobre 1703, Jean-Jacques Malvaisin transmet aux capitouls un mémoire dans lequel il détaille les malversations de François Dandrieu.
Las, Jean-Jacques est encore un peu tendre, son mémoire lui revient en pleine face : il se retrouve lui-même attaqué en justice pour diffamation et fausse accusation. Pot de terre contre le pot de fer, son adversaire est autrement plus puissant qu'il n'imaginait.
En conséquence, le 9 novembre une sentence est rendue par les capitouls et Jean-Jacques se voit condamné à faire des excuses publiques, suspendu de son office de greffier (pour 8 jours seulement) : en outre, son mémoire sera rayé, biffé et lacéré. Bref, il est censuré.
Le petit greffier a probablement appris de ses erreurs, car plusieurs années plus tard, il est à son tour nommé capitoul.

Les capitouls de 1709, ici le capitoul Guillaume-Hyacinthe Pradines de Ciron (fils de Jean-Joseph de Pradines – chez les Pradines, on est capitoul de père en fils), peinture sur parchemin, par Antoine Rivalz. Ville de Toulouse, Archives municipales, BB282, p. 421-i (détail). Notons à droite partie du portrait de Lanoy de Méricourt, autre capitoul blanchy (noirci en fait).

Blanchy !


février 2017

Pourquoi pas blanchi ? Tout simplement car nous vous emmenons sous l'Ancien Régime, là où l'orthographe telle que nous l'imaginons n'était pas vraiment de mise. D'ailleurs, le sens que l'on donne aux mots a aussi varié depuis...

Tenez, pour en revenir à notre blanchy.
Lorsqu'un capitoul était blanchy cela ne signifiait certainement pas qu'il avait prouvé victorieusement son innocence (affaire de mœurs, de détournement de fonds publics, ou autre encore), ni qu'il était maquillé à outrance, ni même qu'il s'était fait enfariner ou entarter par un contestataire facétieux. Non, c'était tout simplement que ce capitoul avait certainement accompli une action si vilaine que ses pairs avaient décidé que son portrait serait blanchy, c'est à dire effacé des tableaux de l'hôtel de ville ainsi que du registre des Annales manuscrites.
Vous imaginez l'arrivée au purgatoire d'un homme politique actuel, dûment blanchi par la justice dans une affaire quelconque (de blanchiment d'argent par exemple), rencontrant ses homologues de l'Ancien Régime et se gargarisant d'avoir été blanchi. Stupeur et incompréhension des premiers face à cet individu hilare qui, pour eux, se vante d'avoir été reconnu coupable.
Jusqu'aux commis du purgatoire (ont-ils un nom ceux-là ?) qui, ne maîtrisant certainement pas les subtilités de l'évolution de la langue française, pourraient bien rediriger le nouvel arrivant vers les enfers.

Revenons maintenant à nos capitouls.
En 1715, Jean-Joseph de Pradines, (capitoul en 1694, puis de 1705 à 1708), est condamné pour crime de concussion et malversation. L'arrêt du parlement (AA27, n° 156) déclare qu'il sera pendu (par effigie, car il a tout de même pris la précaution de filer) et la chronique des Annales manuscrites (BB283, p. 4) précise qu'il sera blanchy des tableaux et des livres de l'Histoire de l'hôtel de ville ; le peintre Escoubé, sera chargé de cette opération (CC2733, n° 42).
Ce qui est un peu cocasse, c'est que, d'un côté on paie un peintre pour blanchir son portrait, et de l'autre, on commissionne quelqu'un (peut-être encore Escoubé) pour faire le portrait du même personnage, afin de pouvoir le suspendre à la potence lors de sa pendaison par effigie !
(s'il y en a qui ne savent toujours pas en quoi consiste une exécution par effigie, ils auront la réponse en téléchargeant le dossier des Bas-Fonds d'avril 2016).

Pour tout vous dire, si Jean-Joseph de Pradines a effectivement été blanchy, il aura certainement aussi été blanchi par la suite puisqu'on le retrouve à Toulouse en 1733, alors qu'il rédige son testament (Archives départementales de la Haute-Garonne, 3E6095, f° 2423-2425, Payan, notaire), dans lequel, apparemment blanc comme neige, il se dit ancien capitoul. Revêtu d'une nouvelle virginité, il s'éteindra finalement le 9 février 1739, à l'âge de 80 ans (GG714, f° 30).
Alors, est-il monté au Purgatoire ou en Enfer ? Qui saurait dire...

Jean-Joseph Pradines, le capitoul aux 50 nuances de blanc ?

Modèle du chariot de la Justice réalisé par Jean Vidal, charron. Ville de Toulouse, Archives municipales, CC2625, n° 102.
Modèle du chariot de la Justice réalisé par Jean Vidal, charron, 7 septembre 1624. Ville de Toulouse, Archives municipales, CC2625, n° 102.

Un aller simple sur le chariot de la Justice


janvier 2017

Imaginez un omnibus qui vous promène nonchalamment dans les rues anciennes de Toulouse, faisant station devant les principales églises et monuments de la ville, le temps de se dégourdir les jambes et admirer l'architecture.
Si vous vous croyez déjà dans le petit train touristique qui sillonne la ville aux beaux jours, vous n'y êtes pas du tout, car nous allons vous parler ici du chariot de la Justice.

Celui-ci faisait partie intégrante du processus de la justice, souvent lié à une condamnation à mort ou afflictive, dans cet acte préalable à l'application de la peine connu sous le nom « d'amende honorable ».

Le condamné (s'applique aussi au féminin) était ainsi promené dans la ville, en chemise, la hart au col, s'arrêtant devant telle ou telle église, un flambeau à la main, faisant pénitence en demandant pardon à Dieu, au roi et à la Justice ; puis la marche reprenait vers d'autres stations. On pouvait aussi s'arrêter devant la maison de la victime (dans le cas d'un meurtre ou d'un vol). Une fois l'amende honorable accomplie, le condamné revêtu d'une toute nouvelle virginité pouvait alors subir la peine fixée par la Justice. Ainsi le chariot, tel la barque d'Achéron des antiques, l'avait transporté jusqu'au pied du gibet (ou bûcher ou roue, c'est selon) dressé pour son passage vers l'au-delà.

Ce chariot de la Justice n'est probablement qu'un vulgaire tombereau qui, en temps normal, doit servir au ramassage des boues (ordures) ; toutefois, en 1624, la ville fait une commande spécifique au charron Jean Vidal d'un « charriot à quatre roues, en forme de carosse, pour apourter les pouvres patiens condempnnés à mort… ainsi qu'est demonstré par le modelle qu'est icy attaché » (CC2625, n° 101-102).

À ceux qui voudraient découvrir des gravures du chariot de la Justice en mouvement, une visite de l'exposition virtuelle, le rituel de l'exécution, présentée sur le site Criminocorpus s'impose.
À ceux enfin qui s'étonnent que nul dossier sur le sujet n'ait encore été livré dans la rubrique Dans les Bas-Fonds des Archives municipales, patience... votre tour viendra !

Inauguration Club 3e âge - Pique-nique à la Ramée. 21 juin 1975. Base de sports et de loisirs de la Ramée, 95 chemin de Larramet, Tournefeuille, Haute-Garonne. Reportage en présence de Pierre Baudis, maire de Toulouse, et de ses adjoints André Brouat et Antoine Osète. Ville de Toulouse, Archives municipales, 15Fi143/4.

Pierre Baudis, maire de Toulouse (1971-1983)


décembre 2016

A l'occasion du centenaire de la naissance de Pierre Baudis, la ville de Toulouse a souhaité rendre hommage à celui qui en fut le premier magistrat de 1971 à 1983. A travers de nombreux documents iconographiques et audiovisuels, cette évocation permet aux Toulousains de rencontrer un homme, dont l'action politique débutée en 1958 ne s'acheva qu'avec son décès en 1997. Elle donne aussi à voir une ville où les grandes mutations urbaines et démographiques côtoient les vestiges du passé et les nécessités de la vie quotidienne.

Réalisée par les Archives municipales de Toulouse, cette évocation témoigne de la richesse des fonds photographiques conservés par cette institution, notamment celui de la direction de la Communication de la ville. A voir au Capitole du 16 décembre au 15 janvier.
La plongée dans ces reportages photographiques procure de savoureuses sensations car ils regorgent de pépites sur les transformations toulousaines des années 1970. En outre, Pierre Baudis prenait part aux diverses manifestations officielles et festives, avec beaucoup de bonhomie. La preuve en images grâce à celle du moi(s) de décembre.

Quel rapport entre cet hommage et la thématique de la lettre ? Tout simplement ce cliché, extrait d'un reportage daté de 1975 sur un pique-nique à La Ramée à l'occasion de l'inauguration d'un club de 3e âge, qui pourrait s'intituler Grille-party à la Ramée !

Cartel destiné à la punition d'une maquerelle. Placard imprimé sur papier (34 × 44 cm), 14 juillet 1775. Ville de Toulouse, Archives municipales, AA306/65.

Sous les arches du pont, Digue don-don, Sous les arches du pont on y trempe la maquerelle, Digue don-daine...


novembre 2016

En fredonnant les paroles données dans le titre, sur l'air de ..., chacun pourrait se voir transporté en tribune sur le pont couvert de la Daurade, ou le Pont-Neuf (selon les époques), en train d'assister à la punition aquatique d'une vilaine maquerelle.
Oui, car celles qui étaient reconnues coupables étaient trempées par trois fois dans l'eau de la Garonne, avant de subir la suite de leur châtiment (bannissement ou enfermement).

Comment s'y prenait-on ? Le système était relativement simple : tout commence par un petit tour en barque en compagnie de l'exécuteur de la haute justice (le bourreau). Il vogue ainsi avec la dame vers une pile de l'ancien pont (celui de la reine Pédauque). Là, se dresse la cage de fer avec sa poulie. La maquerelle est enfermée dans la cage, et notre bourreau actionne la poulie. Après trois « ploufs » successifs, l'appareilleuse est ramenée sur la rive, et la suite de sa peine peut prendre place. Celles encore grelottantes après une telle baignade virent-elles comme un soulagement la séance de fustigation qui les attendait ? On peut en douter.

Bref, à ceux qui voudraient en savoir plus sur cette pratique, nous leur conseillons vivement d'aller découvrir le dossier Haro sur la maquerelle, disponible et téléchargeable sur notre page des Bas-Fonds.

Vue panoramique de la Garonne avec le dôme de l'hôpital de la Grave. Cliché noir et blanc, sur plaque de verre positive, 8,5 × 10 cm. Auteur inconnu, début du 20e siècle. Ville de Toulouse, Archives municipales, 5Fi29.

Poudre d'escampette à l'espagnole


octobre 2016

Un petit saut en arrière nous emmène en 1642. En mars, les troupes françaises, commandées par le comte de la Mothe-Houdancourt remportent une bataille contre l'armée espagnole qui marchait au secours de la ville de Collioure.
On transfère 194 prisonniers de guerre afin de les enfermer à l'hôpital de la Grave. La suite nous est contée dans la chronique des Annales manuscrites de la ville de cette année-là (BB 279, chronique n° 314, p. 329-330) :
« Cella donna de grandes peines ausd[its] sieurs capitouls parce que il falut les nourrir pendant toute l'année aux despans de la ville […] mais de plus il falut les faire garder jour et nuict pour empescher qu'ils n'évadassent, et pour ce fere lesd[its] sieurs capitouls ne treuvèrent point de meilleur moyen que de les fere garder par les habitans de la ville […]. De sorte que entroint en garde tous les soirs avec le tambour battant cent hommes arméz ou plus, qui dem[e]uroint en garde vin[g]t-quatre heures, qui ne fut pas une petite espargne po[ur] la ville parce que si on eust faict garder ces prisoniers par de[s] soldats gagés, la ville se fut consumée en frais ».
Sauf que voilà, la nuit du 24 mai 1642 « qui fut fort obscure et venteuse, lesdits soldats prisoniers qui estoint dans la grand sale aiants percé la muraille du costé de la rivière au-dessoubs des fenestres où elle estoit moings espoisse et plus foible, quelques uns dessendirent bas dans la rivière avec une corde qu'ils avoint faict en partie de la toille de leurs chemises, laquelle attachèrent à la grille de fer desd[ites] fenestres, et ainsin s'en sauvèrent à la nage, de quoy ceux de la garde ny les sentinelles ne s'aperceurent point jusques au landemain matin qu'on void lad[ite] corde pendue ausdictes fenestres et le trou qui avoit esté fait au-dessoubs d'icelles. A cela leur aida l'obscurité de la nuict et le bruit tant de la paissière du molin du Basacle qui est là proche, que du vent d'Autan qui souffloict lors avec grand violence. Lesdicts capitouls en aiant eu advis, se rendirent incontinant dans led[it] hostel, vériffièrent le lieu, firent sortir tous les soldats qui estoint dans lad[ite] sale et firent remettre dans la basse-cour, firent tout fouiller et trouvèrent quelques petites barres de fer q[ue] lesdits prisoniers avoint caché soubs la paille de leurs licts. Et aiants veriffié le tout en informés du faict, treuverent que ceux qui s'estoint sauvéz avoint percé la muraille avec lesdits barres de fer qu'ils avoint esmoulé d'un bout avec quelque pierre du bastiment, et q[u]'aiants fait une ouverture assès grande pour passer, se confiants en ce qu'ils auroint attaché sur leurs testes avec des ficelles qu'ils tenoint avec leurs dents, et ainsin seroint dessendus bas dans la rivière l'un après l'autre et se seroint sauvéz ».

¡ Adios para siempre !

QVID NOVI ?


septembre 2016

Quid novi ? Eh bien la réponse est toute trouvée : au 1er septembre, un conservateur tout neuf est arrivé pour prendre la direction des Archives municipales de Toulouse.

Tout neuf… en fait, pas tout à fait. Il a déjà servi au ministère des Affaires étrangères. Et qu'y faisait-il ? Eh bien, il pilotait des projets numériques, jonglant avec le records management, la GED, les métadonnées, le knowledge management, etc. Oups, ces termes ne vous disent rien et vous pensez que je vous parle latin ?

Bon, alors, reprenons. Rémy Verdo (puisque c'est son nom), est conservateur d'État, il est diplômé de l'École des chartes et de l'Institut national du patrimoine.
Attendez, je ne vous ai pas encore donné le titre de sa thèse : La reconfiguration du latin mérovingien sous les Carolingiens. Étude sociolinguistique des diplômes royaux et des réécritures hagiographiques (VIIe-IXe siècle). Là, je suis désolé, mais on va indubitablement parler latin... et encore, peut-être pas celui du Gaffiot de notre enfance studieuse.

Bref, en deux mots, Rémy Verdo est désormais à la tête des Archives de Toulouse, et il est aussi à l'aise avec le parler mérovingien que celui des informaticiens. Les jaloux voudront peut-être tester ses connaissances en occitan, mais comme il est originaire de Carcassonne, ça risque d'être difficile de le prendre en défaut là aussi.

Plan dressé suite à l'accident de la circulation survenu à l'angle des rues Pargaminières et du Coin du Sac. Dressé par Troy, féodiste. Ville de Toulouse, Archives municipales, FF 808, procédure # 112, du 31 août 1764.

Les voies de la justice vous sont désormais ouvertes


juillet-août 2016

Vous recherchez une maquerelle ? Vous êtes las des banales insultes entre automobilistes, et souhaiteriez en découvrir de plus tranchantes ou savoureuses ? Les brebis de votre voisin viennent sans cesse croquer vos laitues ? Votre épouse s'est faite traiter de gourmande, de truchande ? Et vous de fat, coquin et cartouchien ? Votre employé de maison a filé à l'anglaise avec deux mouchoirs ? Votre calvitie naissante vous fait balancer entre des implants, un traitement coûteux ou une perruque à l'espagnole ? Vous trouvez votre avocat décidément un peu mou de la manche dans l'affaire qui vous oppose à cette vieille tante aigrie ?

Nous vous avons compris ! Pour vous, il n'y a désormais qu'une seule voie à prendre : celle de la justice !

Détail d'un libelle diffamatoire (et anonyme) contre la nommée Jeanne Douat. Placard manuscrit sur papier. Ville de Toulouse, Archives municipales, FF 811 (en cours de classement), procédure du 23 décembre 1767.Afin de faire face efficacement et de pouvoir réagir à tous les problèmes qui vous assaillent, il vous faut absolument venir consulter les archives de la justice criminelle des capitouls. Vous y trouverez des réponses à toutes vos questions existentielles (perruque ou implants), des solutions à vos querelles de voisinage (rapport aux brebis de l'autre), un somptueux catalogue d'insultes (sur les routes encombrées des vacances), des idées et exemples pour une plaidoirie efficace (l'affaire de la vieille tante) ; bref, la liste des possibles semble infinie…

A ceux qui se trouveraient empêchés pendant ces deux mois de congés payés à la Grande-Motte, (ou dans la maison de famille - dont la vieille tante est usufruitière pour moitié), pas de panique.
Les archives criminelles viennent aussi à vous via Internet ; pour cela il suffit de se connecter à la page Dans les bas-fonds, d'où l'on peut télécharger tous les inventaires détaillés déjà disponibles, les dossiers thématiques, ainsi que certains fac-similés de procédures criminelles. De quoi vous occuper jusqu'à la rentrée avant de reprendre gaiement la route de vos archives préférées.

 

Usine d'incinération des ordures ménagères du Mirail, détail machinerie. Ville de Toulouse, Archives municipales, 15 Fi 2130/14.

Poussière, tu redeviendras poussière


juin 2016

Le centre de tri des déchets ménagers et assimilés de la ville de Toulouse, plus connu sous le doux nom d'« incinérateur du Mirail », participe à sa manière à inscrire les Archives dans le cercle vertueux du recyclage. Nous avions vu précédemment (Arcanes, mars 2016) que les documents produits par la collectivité n'ont pas tous vocation à être conservés pour l'éternité. Pour ceux qui n'auront pas l'illustre honneur d'intégrer les « greniers de l'histoire », après avoir constitué des années durant « l'arsenal de l'administration », un sort bien plus funeste les attend : la chaleur infernale des fours de l'usine. Par ce sacrifice vertueux, les archives honnies contribuent au chauffage de 10 000 logements toulousains et à l'autonomie électrique de l'usine, ça, c'est du développement durable ! Et c'est ainsi que d'année en année, des centaines de mètres linéaires d'archives produites par les services de la mairie de Toulouse sont détruites, sous le regard approbateur des Archives départementales, mais ceci est une autre histoire...

Coutume du Poitou, registre manuscrit, fin 15e siècle. Ville de Toulouse, Archives municipales, ii 695 (détail du premier feuillet).

Et si l'administration toulousaine était née dans une ferme du Poitou...


mai 2016

A parcourir l'inventaire de la série ii, vous y trouverez en toute fin un document bien étonnant : un recueil manuscrit des coutumes du Poitou, entièrement rédigé en français, et que l'on peut dater de la fin du 15e siècle.

Des cinq manuscrits de la coutume du Poitou encore existants et recensés en 1956, le plus beau, illustré de nombreuses vignettes, se trouve à Niort, un autre à Poitiers, deux encore à la BnF ; et notre exemplaire toulousain complète fièrement le quintet (quoique un peu surpris de se retrouver là).
En effet, que vient faire une incongruité pareille sur les rayonnages des Archives de Toulouse ? Qui s'est avisé de le déposer parmi des collections bien de chez nous ? Un farceur ? Un descendant de poitevin inexplicablement échoué à Toulouse ? Un ancien archiviste indéniablement plus féru de paléographie qu'il ne l'était de géographie ?

Et si nous passions du coq à l'âne ? Ou peut-être pas tant que ça... Intéressons-nous un instant à Guillaume de Podio. Celui-là les Toulousains peuvent dire qu'il était des leurs : notaire institué par les capitouls en décembre 1504 , greffier du consistoire de la maison commune de 1510 jusqu'à son décès en 1522, l'homme œuvre donc pour la modernisation du fonctionnement des institutions de la ville et précède Pierre Salamonis, qui sera considéré comme le grand réformateur de l'administration toulousaine.

Alors, revenons-en au Poitou : voilà qu'on découvre, en fin de notre exemplaire du coutumier, les signatures de « G. de Podio » griffonnées sur deux pages vierges successives. Mince alors, ce volume aurait donc fait partie des collections de la ville depuis le début du 16e siècle ! Et si nous poussions le raisonnement un peu plus loin : pourquoi ne pas imaginer que Podio ait obtenu copie d'un tel document justement afin de pouvoir s'inspirer des sages préceptes poitevins dans sa réforme projetée de l'administration de la ville... Réforme qu'il ne put conduire à terme, mais que son successeur aura su exploiter et faire adopter.
Coïncidence heureuse : les 9 et 10 juin 2016, le Centre Toulousain d'Histoire du Droit va accueillir un grand colloque sur le thème de La coutume et les décisionnaires (XIIIe-XVIIIe siècles), ce qui offrira peut-être l'opportunité aux chercheurs de se pencher sur cet éventuel lignage intellectuel entre le Poitou et le Toulousain, et de trouver, dans l'organisation administrative de la ville depuis le 16e siècle, des traces, adaptations ou interprétations de certains chapitres ; bref, une influence de la coutume poitevine sous le soleil méridional.
En attendant notre coutumier va prendre le chemin de l'atelier de restauration afin de retrouver un peu de sa splendeur passée avant qu'il ne soit numérisé et mis à disposition des chercheurs (même des Poitevins) via Internet.

Eau d'arquebuse. Etiquette pour l'élixir curatif eau d'arquebuse des distilleries Benoît-Serres, sans date [début 20e siècle]. Ville de Toulouse, Archives municipales, 14 Fi 105 (détail).

J'ai huit secondes pour vous dire que...


avril 2016

A lire les verbaux dressés par les chirurgiens des 17 et 18e siècles au chevet de patients victimes d'accidents ou de coups et blessures, on s'attend à découvrir un véritable catalogue des potions prescrites pour soigner et soulager. Or il n'en n'est rien ! Si la formule « nous lui avons indiqué les remèdes indiqués en pareil cas » revient régulièrement, elle nous éclaire peu sur les drogues utilisées. Dans les cas de traumatologie crânienne, on note bien plusieurs mentions du « poumon de mouton » à appliquer sur la tête afin de calmer les douleurs et prévenir des accidents éventuels, le bouillon et le régime sont souvent prescrits, les saignées ne se comptent plus, mais de médication spécifique il n'en n'est qu'une qui soit clairement énoncée : l'eau de Suisse, ou vulnéraire de Suisse, ou encore l'eau d'arquebusade. Autant vous dire que le produit fait l'unanimité parmi les gens du métier, peut-être parce qu'il peut être utilisé à toutes les sauces : en infusion, « à la manière du thé », appliqué imbibé sur des compresses, ou encore en friction.

Bref, le vulnéraire de Suisse c'était de la Dynamite !

Et si l'on veut bien croire que ce sont les Suisses qui l'ont inventé, tous se mirent bientôt les imiter afin de produire une eau vulnéraire ; la distillerie toulousaine Benoît Serres, pourtant plus versée dans les apéritifs et autres boissons grisantes et euphorisantes, ne faisant pas exception à la règle.

Avatar de François Bordes, directeur des Archives municipales de Toulouse de 1998 à 2016. Dessin Inconito, 2013. Ville de Toulouse, Archives municipales.

Sonne l’heure de la promotion verticale


mars 2016

Après dix-huit années passées à la tête des Archives municipales de Toulouse, François Bordes est appelé à Paris où il va rejoindre le corps prestigieux des inspecteurs généraux des archives au sein du ministère de la Culture.

Des Landes natales à la prépa Chartes au lycée Fermat (Toulouse) ; de l'école des Chartes (rue de Richelieu, Paris IIe) à un premier poste de conservateur aux Archives d'Outre-Mer (Aix-en-Provence) ; une parenthèse sous les drapeaux de la nation (Aix-en-Provence toujours), portant l'élégant uniforme de l'aviation ; puis de la direction des Archives départementales de la Dordogne (Périgueux) à celles de Toulouse (rue des Archives), la carte des déplacements de François Bordes montre plus d'allées et venues du modèle horizontal ou latéral d'ouest en est et vice-versa, que de mouvements verticaux vers le versant nord des rives de la Loire.

Qu'en conclure ? Rien, si ce n'est que cette carte interactive va bientôt être complètement chamboulée, car on sait qu'un inspecteur général est appelé à arpenter le territoire, allant de bureaux de ministères en service d'archives, de halls de gares en tables d'hôtes d'auberges de campagne…
Quant à l'avatar qui ornait le compte Facebook des Archives de Toulouse, il est désormais mis en berne et remplacé par un logo.

Seringue-clystère, vers 18e siècle. Champlitte ; Musée Départemental Albert Demard. [CC BY-SA 3.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0)], via Wikimedia Commons.

Le joujou qui pourrait vous empoisonner la vie...


décembre 2015

Décembre s'avère être un véritable casse-tête pour les parents, grands-parents, parrains et vieilles tantes de tout poil. Il leur faudra trouver le joujou qui fera non seulement plaisir à l'enfant-roi, qui soit aussi dans la ligne de l'éthique familiale prônée par ses géniteurs, mais encore qui serve à son bon développement psychologique, physique, et autres aspects aussi s'il en existe.
Une recherche frénétique d'une idée de joujou dans nos fonds d'archives anciennes a bien failli se solder par un échec, et ce n'est qu'in-extremis que nous avons pu trouver trace d'un jouet d'enfant. Il y a fort à parier que l'objet plairait toujours à vos rejetons ou à ceux de vos enfants, mais gageons que peu d'adultes en feront l'acquisition ce Noël-ci.
A la fin de l'Ancien Régime, ce jouet – le seul qui apparaisse au détour des documents – est une « seringue », seringue à eau s'entend. Quelques enfants plus farceurs ou plus habiles que d'autres auront réussi à s'attirer ainsi les foudres de leurs congénères puisque deux procédures de justice criminelle ont pour origine l'usage malencontreux de ces ancêtres des pistolets à eau de notre enfance.
En août 1755 une aubergiste témoigne avoir vu le nommé Royer prendre de l'eau avec une petite seringue dans un pot de terre où elle faisoit rafraichir les liqueurs. Le chenapan va ensuite asperger l'épouse Descazeaux en accompagnant son geste de quelques insultes pour la bonne mesure (FF 799/6, procédure #160).
En mars 1760, c'est le fils du parfumeur Delongchamp qui se fait remarquer avec son joujou : il commence par asperger les filles d'un boulanger, avec une petite seringue qui ne pouvoit pas contenir plus d'un dé d'eau, plaisir innocent vous en conviendrez, mais le jeune garçon va ensuite invectiver le boulanger avec une rime maison : Mitron mange un étron, avant d'agacer le grand-père avec une badine de roseau. La spirale de la violence dans laquelle le garnement s'est engagé atteindra son paroxysme avec un jet de pierres (FF 804/2, procédure #051).
Seringue toujours, mais version adolescent retardé ou potache cette fois... Revenons en août 1755. Au cours d'une conversation entre compatriotes irlandais, Sullivan, étudiant en médecine, se trouve en désaccord avec MacCarthy, étudiant en théologie. Le premier décide alors de se « venger » et fait envoyer un garçon chirurgien au séminaire des Irlandais, avec mission de demander ledit MacCarthy et de lui appliquer un lavement. On imagine aisément le scandale dans le collège lorsque le chirurgien portant un gros clystère à la main, frappe à toutes les portes en demandant MacCarthy ! (FF 799/6, procédure #168).
Ce facétieux détournement de seringue est à mettre au crédit de la nation irlandaise dont, hélas, on méconnaît encore trop souvent l'humour grinçant.

« Livre des proxenettes », 1756-1790. Registre non folioté. Ville de Toulouse, Archives municipales, HH 97 (détail de la page de garde).

Toute ma vie j'ai rêvé d'être…


novembre 2015

On a tendance à s'imaginer que les archivistes sont des professionnels compétents, des spécialistes des anciens documents administratifs, des fanatiques de la paléographie… et c'est vrai. Mais savez-vous que ces femmes et ces hommes, archivistes par choix et passion bien réelle, ont aussi dans un recoin de leur cœur un feu qui brûle pour un autre métier, une autre vie rêvée ?

Ils vous feront découvrir ce mois-ci ce qu'ils auraient bien pu être si la vie en avait décidé autrement.

Toute ma vie j'ai rêvé d'être… un proxénète !

Depuis l'âge de quinze ans j'ai été attiré par ce métier. Pourquoi, je ne saurais vraiment dire ; ce qui est certain c'est que j'aime particulièrement le contact humain ; et puis il faut reconnaître que le goût des belles choses m'a toujours habité. Une petite boutique confidentielle, bien agencée, deux ou trois assistantes, pas plus. Là j'aurais pu offrir à mes clients un service personnalisé, leur faisant bénéficier de mes conseils avisés.

Aux habitués dont j'aurais connu les goûts particuliers, j'aurais eu cette attention délicate de les prévenir lors d'un arrivage spécial, d'une pièce de collection particulièrement bien tournée… Mon salaire ? Le seul plaisir de voir repartir un client satisfait.

Bref, j'aurais réellement aimé être un proxénète, mais la vie en a décidé autrement, et -sans vouloir le lui imposer- je caresse le doux rêve que ma fille, une fois majeure, embrasse un jour cette belle carrière. G***, 54 ans.
 

PS : Est-il utile de préciser que les « proxenettes » toulousains sous l'Ancien Régime étaient en fait des personnes tout à fait respectables puisque, pour exercer, ils devaient produire un certificat de bonne vie et mœurs ? Car leur métier consistait alors à revendre de vieux vêtements. Des fripiers en quelque sorte.

Charge de pistolet extraite du corps du sieur Cailhol, mars 1786. FF 830 (en cours de classement).

Justice et expertises médico-légales à Toulouse au 18e siècle, une mine qui reste à exploiter.


octobre 2015

On s'imagine bien que les procédures de la justice criminelle renferment les procès-verbaux d'autopsie des malheureux égorgés dans nos ruelles sombres ; cela est vrai, mais leur étude n'apporterait pas grand intérêt tant les cas de meurtres sont rares.

Verbal de blessures dressé par Delpech, maître chirurgien, en faveur de Joseph Tap, garçon chirurgien, 13 novembre 1750. Ville de Toulouse, Archives municipales, FF 794/6, procédure # 199, pièce n° 2 (sur 5).En revanche on ignore trop souvent la présence de centaines de « verbaux de chirurgiens », ces certificats dressés par les hommes de l'art qui décrivent les blessures de leurs patients molestés, les soins et remèdes qu'ils apportent pour les soulager, et où l'on retrouve souvent une estimation du temps nécessaire jusqu'à complète guérison, voire aussi de la durée de l'incapacité de travail de la victime.

Forts de cela, les plaignants versent cette pièce capitale au dossier de la procédure entamée pour coups et blessures, document qui dans leur esprit devra immanquablement faire condamner leur agresseur (et éventuellement leur assurer un coquet dédommagement).

Attention, avant de vous lancer dans la lecture de ces documents, il faudra bien entendu garder à l'esprit que le chirurgien qui rédigeait un tel verbal « en son âme en Dieu » était aussi au service de son patient (qui le payait) et n'hésitait donc pas à faire preuve d'un sens de l'exagération et de la théâtralisation.

L'année 1750 nous offre ainsi pas moins d'une trentaine de pièces rédigées par les chirurgiens, telle celle-ci faite en novembre en faveur de Joseph Tap, garçon chirurgien, victime de coups reçus lors d'une rixe au billard.

 

Visuel de l'exposition Toulouse en vue(s) 1515-2015.

Toulouse en vue(s) 1515-2015


septembre 2015

A compter du 11 septembre, et jusqu'au 10 janvier 2016, les Archives municipales présentent, en collaboration avec le couvent des Jacobins, une superbe exposition : « Toulouse en vue(s), 1515-2015 ». Nous fêtons en effet, et ce n'est pas tous les ans qu'on peut le faire, un 5e centenaire, celui de la première représentation réaliste de notre ville. C'est pour nous l'occasion de présenter au public quelques-uns de nos trésors cartographiques, qu'ils soient manuscrits, gravés ou imprimés, et de réfléchir au sens même de ces représentations. Guide-Souvenir de Toulouse. Dessiné par Ed. Lefranc, Domfront (Orne). Vers 1950. Carte postale N&B, 14 x 9 cm, imprimé. Ville de Toulouse, Archives municipales, 9 Fi 4671.

Elles ont pris parfois, dans cette longue histoire, une forme un peu particulière, comme ce plan touristique des années 1950 qui fit l'objet d'une carte postale.

Il est vrai qu'à une époque où les moyens de communication n'étaient pas aussi nombreux ni performants qu'aujourd'hui, la carte postale représentait un des meilleurs modes de promotion de la ville. L'originalité de ce « Guide-souvenir » est qu'il est dessiné non pas par un Toulousain mais par un citoyen de Domfront, dans l'Orne, qui a signé son œuvre. L'on y remarque la place privilégiée qu'y tiennent le Capitole et la basilique Saint-Sernin, mais également les deux gares Matabiau et Raynal.

 

 

Série d'emblèmes adhésifs représentant la croix occitane. Ville de Toulouse, Archives municipales, 9 Fi 4849.

D’une langue vulgaire à l’autre.


juillet-août 2015

Il est amusant de noter que sous l'Ancien Régime le terme de langue vulgaire était couramment utilisé pour qualifier cette langue que nous appellerons maintenant « l'occitan » (ou le « roman » selon nos archivistes de la fin 19e - début 20e).

Langue de l'oralité, mais aussi usitée dans des ouvrages de littérature forts estimés, cet occitan n'avait pas droit de cité dans les archives de la commune. En effet, la langue de l'administration était le français. Il est donc très rare pour l'archiviste ou le chercheur de découvrir un texte en langue vulgaire dans nos fonds.

Mais si nous faisons un bond en arrière (disons quelque temps avant l'ordonnance de Villers-Cotterêt), la langue vulgaire n'est plus l'occitan, mais bien le français ! Scribes et greffiers rédigeaient alors leurs actes en latin.

Donc, les fonds anciens d'archives publiques ne devraient receler que des pièces en deux langues : le latin pour les plus anciens d'entre eux, puis le français depuis 1539.

D'où l'intérêt pour l'archiviste d'avoir bien appris ses déclinaisons latines (quoique pas toujours respectées dans les documents rencontrés), ainsi que d'avoir évidemment de solides notions de français ; et tant pis s'il maîtrise aussi parfaitement l'occitan, ça ne lui est quasiment jamais utile au travail.

Les brèves qui vont suivre auront donc été de réelles gageures pour des archivistes qui à priori n'auront jamais eu le bonheur de lire un document en occitan, et dont les seuls moments de rencontre avec la langue chantante se font via les annonces au microphone dans le métro.

11-12.06.68 Mai 68. Nuit d'émeutes. Manif. Barricades. Dégâts. Nuit du 11 au 12 juin 1968. Vue d'ensemble de la constitution d'une barricade : au 1er plan amas de pavés et panneaux de signalisation ; en arrière-plan étudiants en train de décrocher des pavés. Vue de nuit. Cliché pris durant les événements de Mai 68 à Toulouse. André Cros. Négatif N&B, 6 x 6 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 53 Fi 1025.

Je conteste, tu t'opposes, ils pétitionnent...


juin 2015

La contestation ou l'art de savoir dire non au sein des archives n'est pas qu'une question d'opinion c'est aussi un sujet de diplomatique -et là je parle de la science de l'étude des documents officiels et non pas des relations parfois tendues entre États ou personnes !

Le conflit fait souvent l'objet d'une procédure dans nos fonds : contestations de propriétés ou de limites de celles-ci, rejet de ventes ou des modalités de mises en œuvre. Elles sont d'ailleurs abondantes les affaires décrites dans les fonds de la justice et police de l'Ancien Régime (série FF) quelque soit le nom qu'elles portent.

Le mot pétition est peut-être celui que l'on risque de trouver en plus grand nombre dans les archives publiques. Mais attention, il ne s'agit pas toujours de LA pétition, signée par un groupe d'opposants. Ce mot désigne souvent un « écrit signé adressé aux pouvoirs publics, qui exprime une opinion, une demande, une plainte, une protestation, un vœu, d'ordre particulier ou général ». C'est la raison pour laquelle il est fréquemment utilisé pour qualifier les demandes d'autorisation d'urbanisme (plus de 64 000 dossiers dépouillés à ce jour !).

Malgré tout, des pétitions, au sens de la revendication, on en trouve de tout temps et elles ont pu être accompagnées d'actes de rébellion comme lors des manifestations de Mai 1968 et des semaines suivantes par exemple.

N'oublions pas cependant que le refus peut grandir certains hommes. Tout est affaire de contexte ! L'entrée en Résistance qui a permis la Libération de la France en est la preuve. Mais comment l'oublier en 2015, année de célébration du 70e anniversaire de la fin de la seconde guerre mondiale ?

Souris aux Archives, 2015.

Des souris aux archives


mai 2015

Les relations entre les archives et les rongeurs sont à géométrie variable.

Dans le domaine de la conservation dite préventive, lorsque la souris n'empiète pas sur le territoire des hommes, l'archiviste la considère avec beaucoup d'indulgence. En revanche, dès qu'elle pointe le bout de son nez dans l'objectif de grignoter les documents anciens ou récents, elle est pourchassée avec opiniâtreté et sans merci.

Comme sujet d'étude au sein des dossiers d'archives, on en trouvera la trace aussi bien dans les questions relatives à l'hygiène et à la santé que dans les livrets d'opéra, qu'elle soit chauve ou pas, et même dans la description d'un diplôme de l'école des Beaux-Arts de Toulouse.

Si on pourchasse la souris dans les collections iconographiques, on s'aperçoit qu'on lui a taillé un costume, en particulier pour le ballet Cendrillon de Serge Prokofiev. Mais la gredine a aussi laissé la trace de ses quenottes sur quelques cartes postales de la Grande Guerre...

S'il y a en revanche un domaine où la souris dispense autant de joie que d'agacement, c'est celui de l'outil informatique :

- Ah... le bonheur de découvrir, d'un clic, des archives sur le sujet qui nous intéresse !

- Hum, hum... la recherche qui nous oblige à cliquer sans fin avant d'éventuellement parvenir à consulter la référence ou le document numérisé tant espéré.

- Oh... le plaisir de voir des lecteurs satisfaits de leur consultation et des fruits de notre travail !

- Pfff... le public insatisfait car nos 13 800 mètres linéaires ne sont pas tous numérisés... ou lorsque certains refusent de toucher à la petite bête car rien ne vaut le papier ?

Mais à la fin, l'archiviste garde toujours l'espoir qu'elle nous aide à réaliser notre travail de... fourmi pour partager et transmettre un patrimoine commun.